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Courir

Définitions de « courir »

Trésor de la Langue Française informatisé

COURIR, verbe.

I.− Emploi intrans.
A.− Emploi abs. [Aspect imperf. du procès]
1. [Le suj. désigne un animé]
a) [En parlant de l'homme et de certains animaux] Se déplacer rapidement par un mouvement successif et accéléré des jambes ou des pattes prenant appui sur le sol :
1. Car si le blaireau ne provoque personne, il se défend dangereusement. Nul carnassier de nos climats n'en vient à bout. Ne pouvant ni courir ni bondir, il se renverse sur le dos, mord et griffe. Pesquidoux, Chez nous,1921, p. 91.
SYNT. (exprimant la très grande vitesse de course). Courir à toutes jambes, ventre à terre; courir à perdre haleine, comme un dératé; courir comme un lapin. Cf. infra II A 2 a courir la poste.
Proverbe. [P. empr. à la fable de La Fontaine Le lièvre et la tortue] Rien ne sert de courir, il faut partir à point. Mieux vaut un effort soutenu et régulier qu'une action brillante mais désordonnée au dernier moment.
En partic.
α) [En parlant d'un cavalier] Courir à toute bride, à bride abattue. Ne freiner en rien l'allure très rapide d'un cheval. Au fig. Cf. bride.
β) SP. Participer à une course de vitesse :
2. Elle avait mis une grosse somme sur un cheval qui courait ce jour-là aux courses de Chantilly. A. France, Le Lys rouge,1894, p. 332.
[Course à pied] Courir (dans telle ou telle épreuve athlétique).
[Course de vitesse quelconque] Courir à bicyclette, en auto, etc. :
3. ... sous les yeux et les applaudissements de toute la nation, dépouillés de leurs habits, ils [les jeunes gens] luttaient, boxaient, lançaient le disque, couraient à pied ou en char. Taine, Philos. de l'art,t. 1, 1865, p. 70.
Faire courir (un cheval, un pilote, etc.). L'engager dans une course. Il avait fait courir jadis et avait eu des succès d'écurie (Lorrain, Phocas,1901, p. 5).
b) [Avec une nuance appréciative]
α) [Étonnement admiratif ou au contraire nuance de reproche] Marcher d'un pas (trop) rapide; se dépêcher.
[En emploi factitif avec nuance d'étonnement admiratif] Ce spectacle fait courir les foules.
[Nuance de reproche] Vous ne marchez pas, vous courez (Littré).
Au fig. Passer vite, ne pas s'attarder sur quelque chose :
4. Pour bien dire la messe, le prêtre devrait redevenir jeune ou souple; ad deum qui laetificat juventutem meam. Car il faut courir, et l'on n'a pas le droit de s'appesantir sur telle ou telle impression, comme dans la prière privée. Bremond, Hist. littér. du sentiment relig. en France, t. 3, 1921, p. 235.
Loc. adv. En courant. À la hâte, superficiellement. Lire en courant. Excusez cette cacographie; je ne veux pas vous faire attendre et j'écris en courant (Gide, Corresp. [avec P. Claudel], 1899-1926, p. 163).
Rem. Noter la loc. adv. vieillie tout courant, « en toute hâte », citée par les dict. gén. et, dans ce même sens, l'emploi abs. de l'inf. Je n'ai pas le temps de faire ma petite écriture à ma façon comme je fais quelquefois, vous savez, celle que vous trouvez jolie. J'écris à courir, et je vous demande bien pardon (Loti, Mon frère Yves, 1883, p. 395).
β) Aller librement ici ou là; vagabonder.
Au fig. Faire courir (vieilli), laisser courir (usuel). Laisser faire, le plus souvent par résignation, ne plus intervenir dans une action en cours. Il [Maxime] avait renoncé au Conseil d'État, il faisait courir (Zola, Curée,1872, p. 589).Au point de vue religieux il [Lamartine] n'avait pas d'opinion très nette (...) il laissait courir (Barrès, Cahiers,t. 10, 1913-14, p. 52).
γ) [En parlant d'un malfaiteur ou de quelqu'un qui ne veut ou n'ose pas rester sur place] S'enfuir, s'échapper le plus rapidement possible.
Loc. Il court encore. Il s'est enfui pour ne pas se laisser prendre, ou parce qu'il n'ose pas insister :
5. − Et qu'a répondu ce M. Bloch? demanda distraitement Mmede Guermantes (...) − Ah! je vous assure que M. Bloch n'a pas demandé son reste, il court encore. Proust, Le Côté de Guermantes 2,1921, p. 505.
c) Faire des courses*., des démarches pour se procurer ou pour obtenir quelque chose. 24 janvier. Couru pour les affaires de Mmede St(aël). Elle sera payée, je le crois (Constant, Journaux,1815, p. 429).
Rem. Ce sens se rattache aux emplois mentionnés sous I B 2 c.
Péj. Faire courir qqn. Faire faire une démarche inutile; faire perdre son temps à quelqu'un.
2. P. anal. [Le suj. désigne un inanimé capable de mouvement]
a) [L'accent est sur la rapidité du mouvement] Se déplacer rapidement. Des nuages couraient dans le ciel, de temps à autre la pluie tombait (Flaub., Bouvard, t. 1, 1880, p. 18).Un vent glacial courut, accéléra le vol éperdu de la neige, intervertit l'ordre des couleurs (Huysmans, À rebours,1884, p. 61).
[En parlant de corps liquide] Couler rapidement. Le sang court dans les veines :
6. ... son visage étincelait d'amour, Et mes regards, fermés pour les choses profanes, Voyaient le sang courir dans ses bras diaphanes! T. de Banville, Les Exilés,Le Cher fantôme, 1874, p. 96.
b) [L'accent est sur la régularité et la continuité du mouvement]
α) [En parlant du temps] Se dérouler de façon continue :
7. On a aplani la difficulté, un contrôle de disponibilité est ouvert. Là les officiers inscrits voient courir leur temps comme s'ils rendaient des services effectifs. Chateaubriand, Correspondance gén.,t. 2, 1789-1824, p. 34.
Par le(s) temps qui court (courent). Actuellement. Ah! C'était un brave ami (...) un homme rare par le temps qui court (Maupass., Pierre et Jean,1888, p. 306).
β) Au fig., FIN. [Avec une idée de délai] Être compté régulièrement comme dépense à partir d'une certaine date (exprimée ou laissée implicite). Les intérêts courent à partir d'aujourd'hui :
8. [Il faut] tenir compte des jours de chômage pendant lesquels l'animal de trait ne produit aucun travail utile, alors que son entretien continue cependant à courir. Haton de La Goupillière, Cours d'exploitation des mines,1905, p. 752.
c) [L'accent est sur l'avancement spontané du mouvement]
α) [En parlant d'un aspect de la nature] Se répandre dans un espace. Une plante court sur le sol.
GÉOGR. S'étendre dans une certaine direction. La côte court du Nord au Sud. Les racines [de la bourdaine] courent à fleur de terre (Baudrillart, Nouv. Manuel forest.,trad. de Burgsdorf, t. 1, 1808, p. 304).Le lierre courait sur les murs des maisons basses (Druon, Roi de fer,1955, p. 150).
β) [En parlant d'un bruit, d'une nouvelle] Se propager. Elle-même répéta la phrase, qui courut ainsi d'oreille à oreille, au milieu des exclamations et des rires étouffés (Zola, Assommoir,1877, p. 719).
Loc. verbale. Le bruit court que :
9. Le bruit courait que Gundermann, contrairement à ses habitudes de prudence, se trouvait engagé dans d'effroyables risques... Zola, L'Argent,1891, p. 316.
γ) [En parlant d'un objet destiné à se déplacer] Aller librement, sans contrainte, sans contrôle. Laisser courir sa plume :
10. Représenter, rendre ce monde, ces trois dimensions, avec cette plume qui gratte régulièrement, qui court sur le papier. Péguy, Victor-Marie, comte Hugo,1910, p. 700.
MAR. Faire (laisser) courir une manœuvre (un cordage) :
11. Tout le gréément du bateau est englobé dans une coque de glace (...) et il est totalement impossible de faire courir les manœuvres. J.-B. Charcot, Le« Pourquoi Pas? » dans l'Antarctique, 2eexpédition antarctique fr., 1908-10, 1910, p. 352.
B.− Emploi prép. [La prép. ajoute à l'aspect imperf. du verbe une valeur d'aspect perf. ou une nuance de cet aspect]
1. [Aspect perf. pur et simple; la prép. indique le but, le terme du procès] Courir à.
a) [Le suj. désigne une pers.] Se porter rapidement et parfois en masse vers quelqu'un ou vers quelque chose. Courir au feu, aux armes; courir à un spectacle. Les hommes courent à leurs quêtes Sur la terre, ardents et pressés (Dierx, Poèmes et poés.,1864, p. 17):
12. À peine se fut-on quitté, que le chevalier de Beauvoisis courut aux informations : elles ne furent pas brillantes. Stendhal, Le Rouge et le Noir,1830, p. 269.
Courir au plus pressé. Se hâter d'accomplir ce qui est urgent :
13. En me promettant à moi-même qu'Albertine serait ici ce soir, j'avais couru au plus pressé et pansé d'une croyance nouvelle l'arrachement de celle avec laquelle j'avais vécu jusqu'ici. Proust, La Fugitive,1922, p. 428.
Courir à sa ruine, à sa perte. Tomber inexorablement dans une situation extrême :
14. Vous n'avez pas reconnu votre véritable ennemi, vous lui prêtez de petits motifs. Il n'en a que de grands et vous courez à votre perte. Camus, Caligula,1944, II, 2, p. 34.
Spéc., MAR. Courir au nord, au sud, à terre, au large, etc. Faire route en direction de.
b) Au fig. [Le suj. désigne une chose abstr.] Être sur le point de (finir). La saison court à sa fin :
15. Les événements courent trop vite à leur fin; on n'a pas assez de temps pour faire, en quelque sorte, connaissance avec les personnages, ce qui rend l'intérêt moins vif. Lamennais, Lettres inédites... à la baronne Cottu,1830, p. 216.
2. [Aspect connotatif progressif au procès; la prép. suggère l'idée d'un effort dans une poursuite voulue par le suj. pers.] Courir après.
a) [Le compl. désigne une pers.] Courir après qqn.Chercher à l'atteindre rapidement. Son oncle, ne la voyant pas revenir du bout de la place, courut après elle (Stendhal, Lamiel,1842, p. 128).Courir après un homme, une femme (au fig.). Le, la poursuivre de ses assiduités :
16. Ce hideux calotin ose insinuer et même dire assez clairement que, lorsqu'il portait encore la soutane, toutes les femmes couraient après lui, et qu'il n'avait qu'à se baisser pour en prendre. Bloy, Journal,1900, p. 384.
b) [Le compl. désigne une chose] Chercher à atteindre, à obtenir une chose par tous les moyens. Courir après les honneurs, la gloire. Courir après son argent. Essayer de regagner, de rattraper l'argent perdu au jeu ou essayer de se faire payer l'argent dû. Courir après l'esprit. Chercher à être spirituel. Courir après son ombre. Chercher à atteindre l'impossible :
17. Ne me demande point à moi, sculpteur, de courir après la beauté : je m'assiérai ne sachant où courir. Saint-Exupéry, Citadelle,1944, p. 697.
c) Loc. [Avec ell. du compl. prép.]
Fam. Tu peux toujours courir! Tu auras beau faire, tu n'obtiendras pas ce que tu veux.
Proverbe. Il vaut mieux tenir que courir (cf. un tiens vaut mieux que deux tu l'auras).
3. [Aspect directif; la prép. exprime une idée d'approche, souvent doublée d'une valeur affective] Courir sur ou sus à.
a) [Le compl. désigne l'âge de qqn avec parfois une idée de vivacité ou d'appréhension] S'approcher rapidement de. Courir sur ses trente ans. Marianne est très vieille et court sur ses cent ans (Verlaine, Œuvres compl., t. 3, Invect., 1896, p. 346).
Rem. Dans l'expr. courir sur les brisées de qqn, sur exprime le terrain dans lequel on a pénétré, avec sans doute, comme plus haut, une idée d'illicite.
b) [Avec gén. une idée d'hostilité] Se précipiter sur :
18. Indouvoura courut sur Yassiguindja. Elle l'aurait frappée, mordue, griffée. Elle débitait des menaces pendant que ses compagnes la maintenaient. Maran, Batouala,1921, p. 55.
Au fig. S'attaquer à, combattre. Courir sus aux abus.
C.− Emploi semi-auxil. Courir + inf.[Le plus souvent pour dire que l'on fait vite l'action exprimée par l'inf.] Qu'on coure me chercher de l'huile de térébenthine et de l'émétique (Dumas père, Monte-Cristo,t. 2, 1846, p. 303).
Rem. Pour souligner l'idée de but, l'inf. peut être précédé de la prép. pour. Elle courait pour chercher quelque drogue à la pharmacie (Sand, Hist. vie, t. 3, 1855, p. 145).
II.− Emploi trans.
A.− [Le suj. désigne un animé]
1. [Aspect perf. du procès, avec une idée de poursuite; l'obj. désigne un animé ou un inanimé suggérant une idée de proie à prendre]
a) [La proie est une bête sauvage] Donner la chasse à. Courir le cerf, le lièvre :
19. Quoique je sois bien décidé à ne frayer qu'avec les gens de la plus haute volée, vous aurez cependant vos petites entrées, mon cher Monsieur Jolibois, et de temps en temps vous viendrez courir un cerf avec moi. Sandeau, Sacs et parchemins,1851, p. 3.
Proverbe. Il ne faut pas courir deux lièvres à la fois. S'engager dans deux entreprises différentes, c'est risquer d'échouer dans l'une comme dans l'autre.
Rem. Courir qqn se rencontre dans la lang. class. au sens de « poursuivre qqn en courant » et dans la lang. pop. au sens de « importuner » : tu me cours (sur le système, sur le haricot, sur le ciboulot, etc.). Elle me court! menace Jady (Colette, Music-hall, 1913, p. 199).
b) P. anal., dans le lang. de la galanterie. [La proie est une pers. gén. du sexe fém., ou ce qui la représente] Courir les filles, la gueuse, les jupons; courir la prétantaine :
20. Madame de Kergant (...) voyait (...) dans le champ étroit et fantasque de ses préjugés l'ancien pupille de son frère (...) courant le guilledou sous l'étrange costume qu'elle prêtait aux sans culottes... Feuillet, Bellah,1850, p. 20.
c) P. ext. [La proie est un avantage recherché] Rechercher vivement, poursuivre assidûment. Courir le cachet, les honneurs.
P. méton. Au cours de cette poursuite affronter des périls, s'y exposer. Courir des risques.
d) P. méton., SP. [La proie est suggérée par la nature de l'épreuve au bout de laquelle la victoire peut être atteinte] Participer à une course pour la gagner. Courir un cent mètres. Ce dimanche-là (...) on courait le Grand Prix de Paris au bois de Boulogne (Zola, Nana,1880, p. 1375).
2. [Aspect perf. instrumental; l'obj. désigne un lieu à travers lequel on se déplace en tout sens dans une intention plus ou moins précise]
a) [Le lieu est un espace d'une certaine étendue ou complexité] Parcourir, sillonner, voyager à travers un lieu pour y chercher à satisfaire un désir. Courir la ville, le monde. C'était un de ces forains qui courent les campagnes, le dos chargé de leur marchandise (A. Daudet, Jack,t. 1, 1876, p. 230).
Vieilli. Courir le pays. Faire une incursion rapide en pays ennemi.
P. méton. Courir la poste. Parcourir vite les relais de poste, aller fort vite et au fig. se dépêcher outre mesure pour atteindre son but. Le lendemain, Suter court la poste sur la route de Paris (Cendrars, Or,1925, p. 26):
21. Une voyageuse, qui courait la poste, fut prise des douleurs de l'enfantement à la poste du prieuré... G. Sand, La Comtesse de Rudolstadt,t. 1, 1844, p. 97.
Courir la mer. Faire la course* :
22. On eût dit un de ces vieux récits (...) où il est question de corsaires barbaresques courant les mers latines... A. Daudet, Le Nabab,1877, p. 172.
Emploi abs. :
23. Or, vers la fin de 1702, elle [l'Espagne] attendait un riche convoi que la France faisait escorter par une flotte de vingt-trois vaisseaux commandés par l'amiral de Château-Renaud, car les marines coalisées couraient alors sur l'Atlantique. Verne, Vingt mille lieues sous les mers,t. 2, 1870, p. 92.
b) [L'obj., gén. au plur., désigne une suite de locaux que fréquente la Société] Fréquenter assidûment en allant d'un lieu à un autre pour y chercher son plaisir. Courir les théâtres, les salons.
B.− [Le suj. désigne un inanimé]
1. Vieilli. [En parlant d'une rumeur, d'un bruit] Se répandre dans (cf. supra II A 2 a). Cette nouvelle court la ville, les rues.
Loc. fig. Courir les rues. Se trouver partout, être normal, commun. Nous habitons une ville de commerçants, où le bon goût ne court pas les rues (Maupass., Pierre et Jean,1888, p. 367).
2. MAR. [En parlant d'un navire et p. ext. des marins] Courir une (des) bordée(s).
Prononc. et Orth. : [kuʀi:ʀ], (je) cours [ku:ʀ], couru, ue [kuʀy]. Ds Ac. depuis 1694. Ac. 1694-1798 : « courir ou courre ». Les mots de la famille de courir s'écrivent evec un seul r sauf courre (chasse à −), courrier, courriériste, concurrent, occurrence, récurrent et leurs dér. (pour cette liste cf. Ortho-vert 1966, p. 173). Comparer l'imp. je courais et le fut. et cond. je courrai(s) dans lesquels la consonne double qu'on prononce géminée [kurr ε] sert à distinguer les temps (cf. Nyrop Phonét. 1951, § 130 et § 251, ainsi que Mart. Comment prononce 1913, p. 217). Noter que Fér. 1768 et Fér. Crit. t. 1 1787 transcrivent à l'inf. [kuʀi] qui est l'anc. prononc. des inf. en -ir du moy. fr. jusqu'au milieu du xviiies. où r final est restauré sous l'infl. des verbes comme dire, écrire, etc. (cf. Bourc.-Bourc. 1967, § 183 H). Homon. : formes du verbe courir et cour, cours, court. Étymol. et Hist. A. Intrans. 1. mil. xies. curre « se déplacer par élans » (Vie de Saint Alexis, éd. Chr. Storey, 423); 2. a) mil. xies. « (d'une chose) se mouvoir avec rapidité » (ibid., 79); b) 1262-68 « se dépêcher » (Brunetto Latini, Li Livres dou Tresor, éd. F. J. Carmody, p. 23, 13); 3. 1559 « courir dans une compétition » (Amyot, Vies. Thémistocle, 47 ds Littré); 4. a) ca 1100 curir a aucun « courir pour atteindre quelqu'un » (Roland, éd. J. Bédier, 2086); b) ca 1160 + inf. « aller vite dans un certain but » (Enéas, éd. J.J. Salverda de Grave, 909); 5. a) ca 1100 « couler » ewe curant (Roland, 2226); b) 1119 « avoir cours, être en vigueur » (Ph. de Thaon, Comput, éd. E. Mall, 3544); c) apr. 1225 « être répandu, circuler (bruit, renommée) » (Gerbert de Montreuil, Continuation de Perceval, éd. M. Williams, 3638); d) 1690 « s'étendre, se dérouler » (Fur. [ici, en parlant d'un rhumatisme, d'une dartre]). B. Trans. 1. ca 1210 « parcourir, sillonner (un pays, etc.) » (Herbert Le Duc de Dammartin, Folque de Candie, éd. O. Schultz-Gora d'apr. FEW t. 2, p. 1570a); 2. a) ca 1225 « poursuivre à la course » (Péan Gatineau, Saint Martin, éd. W. Söderhjelm, 1252); b) 1434-38 « poursuivre quelqu'un » (Jacques D'Esch, Chronique messine, éd. G. Wolfram d'apr. FEW t. 2, p. 1569 b); c) 1690 « rechercher, courtiser » (Fur.); 3. 1547 « fréquenter assidûment (un lieu) » (Noël Du Fail, Propos rustiques et facétieux, t. 1, p. 75 ds IGLF); 4. av. 1558 « s'exposer à, risquer » (Mellin de Sainct-Gellais, Œuvres complètes; éd. P. Blanchemain, t. 2, p. 78); 5. 1585 « rechercher avec ardeur » (Noël Du Fail, Contes et discours d'Eutrapel, t. 2, p. 233 ds IGLF); 6. [1883?] 1895 pop. courir à qqn « importuner quelqu'un » (sans réf. ds Esn.); 1901 courir qqn (ibid.); 7. 1901 fam. c'est couru « c'est prévisible » (Bruant, p. 175 [à l'orig., terme de turf]). Du lat. currere « courir ». L'anc. forme courre a été supplantée à partir du xiiies. par courir (ca 1275, Rose, F. Lecoy, 15890), formé d'apr. les verbes en -ir. Fréq. abs. littér. : 13 612. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 17 337, b) 24 133; xxes. : a) 20 292, b) 17 961. Bbg. Baldensperger (F.). Notes lexicol. R. de philol. fr. et de litt. 1927, t. 39, p. 58. − Gottsch. Redens. 1930, passim.Goug. Lang. pop. 1929, p. 135. − La Landelle (G. de). Le Lang. des marins. Paris, 1859, pp. 298-299. − Mat. Louis-Philippe 1951, p. 82. − Quem. 2es. t. 2 1971. − Rog. 1965, p. 131, 179, 234, 237. − Spitzer (L.). Courir la calabre. Fr. mod. 1948, t. 16, pp. 165-166.

Wiktionnaire

Verbe - ancien français

courir \Prononciation ?\

  1. Variante de courre.

Verbe - français

courir \ku.ʁiʁ\ transitif ou intransitif : 3e groupe (voir la conjugaison)

  1. Se déplacer rapidement, avec impétuosité, par un mouvement alternatif des jambes ou des pattes prenant appui sur le sol, avec une phase de suspension en l’air, sans appui.
    • Sur ces entrefaites, la portière se souleva et Henri de Navarre parut. La petite levrette, qui dormait sur le trône, bondit et courut à lui. — (Alexandre Dumas, La Reine Margot, 1845, volume I, chapitre VI)
    • Le soir, dédaignant les taxis, je rentrais à bord presque toujours en courant pour me maintenir en bonne condition physique. — (Alain Gerbault, À la poursuite du soleil ; tome 1 : De New-York à Tahiti, 1929)
    • Un monsieur, courant, une serviette sous le bras, le heurta sans ménagements et l’arracha à son hébétude. — (Victor Méric, Les Compagnons de l’Escopette, Éditions de l’Épi, Paris, 1930, page 21)
    • Autour de la chambre, le long de la plinthe, des belettes courent, bondissent, se poursuivent… — (Octave Mirbeau, La tête coupée)
    • Marie arriva bien vite, sa cape jetée à la hâte sur ses épaules, sa calipette de travers d’avoir tant couru, […]. — (Daniel Cario, Les Moissonneurs de l'Opale, Presses de la Cité, 2013, chapitre 43)
  2. (Par extension) Être en mouvement, en parlant des choses.
    • Tenant dans ses bras Marie, âgée de trois ans, il la présentait avec orgueil aux ambassadeurs étrangers et voulait qu'elle jouât du clavecin en leur présence. C’était merveille de voir courir de si faibles doigts sur les touches avec précision et rapidité. — (Adelaïde Celliez, « Marie Tudor », dans Les Reines d'Angleterre, Paris : chez P.-C. Lehuby, 1852, page 461)
    • Et enfin, vous voudriez que Dieu fît courir le soleil, qui est quatre cent et trente-quatre fois plus grand que la terre, rien que pour pommer nos choux ? — (Umberto Eco, L’île du jour d’avant, Grasset & Fasquelle, 1996)
    • Faire courir une manœuvre dans ses poulies.
  3. Disputer une course.
    • Ce cheval a couru aux dernières courses.
    • Faire courir, envoyer sur le champ de course des chevaux pour disputer ce prix.
    • (Transitif) Courir le grand prix de Diane.
    • (Transitif) Courir une carrière, être engagé dans une profession, une entreprise, etc., où l’on s’efforce d’obtenir des succès, de l’emporter sur ses rivaux.
    • Vous courez une périlleuse carrière.
    • Hortensias et Cicéron couraient la même carrière.
  4. (Figuré) (Familier) Définition manquante ou à compléter. (Ajouter)
    • Courir encore, signifie qu’on s’est échappé en toute hâte, qu’on ne se laissera plus prendre à une chose.
    • Il m’a suffi de le voir, de l’entendre : je cours encore.
  5. (Vieilli) Aller plus vite que le pas.
    • Vous allez trop vite, vous ne marchez pas, vous courez.
  6. Aller avec empressement.
    • L’Empereur ne s’arrêta pas à Phalsbourg ; tandis qu’il courait déjà sur la route de Saverne, le canon tirait ses derniers coups. — (Erckmann-Chatrian, Histoire d’un conscrit de 1813, J. Hetzel, 1864)
    • Je cours le prévenir.
    • Courez, ne perdez pas un instant.
    • Courir au plus pressé, s’occuper, avant toute autre chose, de ce qui importe le plus dans le moment.
  7. (Figuré) Aller, poursuivre (souvent dans un sens péjoratif).
    • Courir après les honneurs, les places, les richesses, la fausse gloire, etc.
    • Courir après des chimères, après des fantômes.
    • Courir à sa perte, à sa ruine.
    • Courir après l’esprit, mettre de la recherche, de l’affectation, de l’effort à montrer de l’esprit.
    • Courir après l’argent, chercher toutes les occasions de gagner de l’argent.
    • Courir après son argent, continuer à jouer pour regagner ce qu’on a perdu. Faire des démarches, des poursuites pour recouvrer une somme d’argent qu’on a de la peine à se faire rendre, à se faire payer.
    • Fuis la haute science, et cours après la bonne. — (Pierre Corneille, L’imitation de Jésus-Christ traduite en vers français, Livre 1, chapitre 2)
    • Courir à sa fin se dit des choses qui sont près de finir, qui n’ont pas longtemps à durer.
  8. (Figuré) Faire trop vite.
    • Il faut aller bride en main, on ne fait pas les affaires en courant.
    1. (En particulier) Lire, réciter, prononcer, écrire ou composer trop vite.
    • Lisez doucement, ne courez pas.
    • Il a écrit cela en courant.
    • Il laisse courir sa plume sur le papier.
  9. (Familier) Aller çà et là, sans s’arrêter longtemps en chaque endroit.
    • Il ne fait que courir.
    • Il est toujours à courir.
    • Il court du matin jusqu’au soir.
  10. (Marine) Faire route, louvoyer.
    • Courir au nord.
    • Courir au sud.
    • Courir des bordées, courir des bords, louvoyer, aller alternativement à droite et à gauche, quand le vent est presque debout.
    1. (Par analogie)
      • Les copains coururent quelques bordées à la recherche d’une auberge. — (Jules Romains, Les Copains, 1922, réédition Le Livre de Poche, page 91)
  11. Prolonger, aller dans une direction déterminée.
    • Cette côte court de l’est à l’ouest l’espace de trois ou quatre lieues.
    • Ces montagnes courent du nord au sud et partagent de grands continents.
  12. Couler, s’écouler.
    • Le ruisseau qui court dans la prairie.
    • Le Rhône court du nord au sud.
    1. Se dit figurément du Temps.
      • Le temps court insensiblement.
      • Par les temps qui courent, dans le temps présent, dans les circonstances actuelles.
      • C’est sous l’emprise de cette introspection que je me suis abîmé dans la contemplation, habité par l’esprit des temps qui courent. […] — (Cornéliu Tocan, Aux confins de l'invisible. Haïkus d'intérieur illustrés, Créatique, Québec, 2020, page 8)
  13. Échoir à propos d’une rente, de gages, d’appointements, etc.
    • S'il s'agit d'une location pour une durée déterminée et qu'il reste moins de douze mois à courir à la location, le nouveau locateur ne peut mettre fin au bail et le locataire ne perdra aucun droit. — (Bernard Clermont & ‎Benoît Yaccarini, Initiation au droit des affaires du Québec, Presses de l'Université Laval, 4e édition, 1986, page 265)
    • L’intérêt de cette rente court du commencement de l’année.
    • Ses gages, ses appointements courent du milieu du mois.
    • Son loyer court du mois de janvier.
  14. Circuler, se propager, se communiquer. — Note : En ce sens, il est souvent impersonnel.
    • Les Haudoin n’avaient jamais exploité les rumeurs qui couraient Claquebue sur les habitudes incestueuses de la famille Maloret. — (Marcel Aymé, La jument verte, Gallimard, 1933, réédition Le Livre de Poche, page 13)
    • Gui, se détournant à peine, entrevit les sourires de Berry et de Bourgogne, la lippe dubitative d'Orléans - qu'on n'avait guère vu car la rumeur courait qu'il fréquentait les bordeaux de la ville -, les lèvres pincées d'Olivier de Clisson. — (Pierre Naudin, Les fureurs de l'été, éd. Aubéron, 1999, page 328)
    • Il court des bruits fort désavantageux sur son compte.
    • Faire courir de fausses nouvelles.
    • Une rumeur très alarmante court depuis hier dans le public.
  15. (Figuré) Être en vogue.
    • La mode qui court.
    • Cette chanson courait par la ville.
  16. (Chasse) Poursuivre à la course avec dessein d’attraper.
    • […]; or, on conçoit l'affectueuse et haute estime de tout veneur pour la sagacité de son limier, lorsqu'on songe que, selon cette sagacité, on chasse ou on fait buisson creux , en cela que le limier doit d'abord chercher et trouver l'animal destiné à être ensuite couru et forcé par la meute. — (Eugène Sue, « La meute des petits chiens du Cabinet », chapitre 6 de Latréaumont, 1837, nouvelle édition, tome 1, Paris : chez Charles Gosselin & chez Pétion, 1845, page 169)
    • Courir le même lièvre se dit de deux personnes qui sont en concurrence pour la même chose.
    • Qui court deux lièvres n’en prend aucun, Poursuivre deux affaires à la fois, c’est s’exposer à ne réussir ni dans l’une ni dans l’autre.
  17. (Figuré) En parlant des personnes ou des choses qu’on recherche avec empressement, qui sont fort en vogue. On ne l’emploie guère qu’au participe passé.
    • Ce prédicateur est fort couru.
    • Ce spectacle est très couru.
  18. (Figuré) Être exposé à.
    • Un rhume, en apparence bénin peut, s’il est négligé, dégénérer en bronchite ou en pneumonie ; le plus sage serait d’éviter de courir ce risque en prenant des précautions nécessaires pour que vous ne vous enrhumiez pas. — (Mieux vaut prévenir que guérir, dans Almanach de l’Agriculteur français - 1932, page 33, éditions La Terre nationale)
    • Courir des chances, courir la chance de…, S’exposer à un risque dans l’espoir d’un avantage.
    • Courir même fortune, être dans les mêmes intérêts, dans la même situation d’affaires.
    • Courir les aventures se disait des chevaliers qui allaient à la recherche des exploits guerriers. Il se dit aussi de quelqu’un qui cherche à se faire un nom ou une fortune par des moyens qui ne sont pas les moyens ordinaires.
  19. (Transitif) Parcourir.
    • Pour un curieux qui ne veut pas courir le monde en quête de documents, Montmartre peut suffire. Il y trouvera toujours à glaner. — (Francis Carco, Images cachées, Éditions Albin Michel, Paris, 1928)
    • —Quand je vois où cette sagesse m’a mené, je regrette de n’avoir pas, avec des compagnons de plaisir, couru les cafés et les festins. Je regrette… — (Germaine Acremant, Ces dames aux chapeaux verts, Plon, 1922, réédition Le Livre de Poche, page 208)
    • J’ai couru toute la ville sans le trouver.
    • Courir les champs.
    • Courir le pays, parcourir tel ou tel pays, en vue de le connaître à fond.
    • Courir le monde, voyager en divers pays par goût d’aventure.
    • (Familier) Cette histoire court les rues, elle est sue de tout le monde.
    • L’esprit court les rues, l’esprit est commun, tout le monde en a.
  20. Hanter, fréquenter, poursuivre de ses assiduités.
    • Je commençais à « courir ». Ma mère m’observait avec une craintive indulgence. J’ai vu depuis, en vivant chez les tiens, l’importance que prennent ces désordres dans une famille religieuse. Ma mère, elle, n’y voyait d’autre inconvénient que ce qui pouvait menacer ma santé. — (François Mauriac, Le Nœud de vipères, Grasset, 1933, réédition Le Livre de Poche, page 28)
    • Quant à la petite, qui s’appelait Germaine, elle était de tous les bals depuis l’âge de quinze ans et elle avait couru avec tout le monde. — (Georges Simenon, Les Demoiselles de Concarneau, Gallimard, 1936, réédition Folio, page 56)
    • Pourtant, elle n’était pas bigote. Des soirs, elle courait l’homme. — (Francis Carco, L’Homme de minuit, Éditions Albin Michel, Paris, 1938)
    • L’inspecteur vous aura dit que j’étais une fille de rien, est-ce vrai ? Que je courais les hommes comme une chienne ? Oui ? que je vous empaumais sans doute ? consciente de l’impasse ou je vous acculais ? — (Jean Rogissart, Passantes d’Octobre, Librairie Arthème Fayard, Paris, 1958)
    • Je crois qu'elle sait que le meilleur des meilleurs de L.A. court la chatte et baise avec un tas de connasses sordides qui n'arrivent pas à la cheville de la femme qu'il a épousée. — (James Ellroy, Lune sanglante, traduit par Freddy Michalski, Payot & Rivages, 1987)
  21. (Familier) Ennuyer, importuner (abréviation de l'expression : courir sur le haricot)
    • « Ouste, je lui ai dit, mon enfant. On vous a assez eu. ». Le malheur, c’est que ça ne lui entrait pas et qu’il a fallu lui expliquer avec douceur, quoi, qu’il commençait à me courir, qu’on ne l’avait pas fait venir pour entretenir le feu — et si son père l’avait fait faire dans les prisons — comme les noix de coco. Du coup, il a mis son chapeau sur sa tête ; et il est parti, avec votre parapluie, même. — (Paul-Jean Toulet, Mon Amie Nane, 1922)
    • Mais nous, les hommes, il nous courait — (Raymond Asso, Browning, chanson d'Édith Piaf, 1938)
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

COURIR. (Je cours ; nous courons. Je courais. Je courus. Je courrai. Cours. Que je coure. Que je courusse. Courant. Couru.) v. intr.
Aller avec vitesse, avec impétuosité. Courir de toute sa force. Courir sur quelqu'un. Courir après quelqu'un. Courir à toutes jambes. Ils couraient aussi vite l'un que l'autre. Ceux qui couraient dans les jeux Olympiques. On le dit, également et par extension, des Choses, quand elles sont susceptibles de mouvement. Ces nuages courent dans le ciel. Faire courir une boule. En termes de Marine, Faire courir une manœuvre dans ses poulies. Il se dit absolument des Chevaux qui disputent le prix de la vitesse. Ce cheval a couru aux dernières courses. Faire courir signifie Envoyer sur le champ de course des chevaux pour disputer ce prix. Transitivement, Courir le grand prix de Paris. Il se dit aussi des Épreuves de vitesse de cyclisme, d'automobilisme, de bateaux à rames, à voiles ou à moteurs. Fig. et transitivement, Courir une carrière, Être engagé dans une profession, une entreprise, etc., où l'on s'efforce d'obtenir des succès, de l'emporter sur ses rivaux. Vous courez une périlleuse carrière. Hortensias et Cicéron couraient la même carrière. Prov. et Fig., Ce n'est pas le tout que de courir, il faut partir de bonne heure, ou Rien ne sert de courir, il faut partir à temps, Ce n'est pas assez de se hâter quand on veut réussir dans une entreprise, il faut prendre ses mesures de loin. Fig. et fam., Je cours encore, Il court encore, signifie qu'on s'est échappé en toute hâte, qu'on ne se laissera plus prendre à une chose. Il m'a suffi de le voir, de l'entendre : je cours encore. Courir sus à quelqu'un se disait, dans les anciennes Ordonnances, pour Se jeter sur quelqu'un, l'arrêter, le maltraiter. Il fut mis hors la loi, et chacun eut le droit de lui courir sus. Figurément, il signifie S'en prendre à quelqu'un, se précipiter violemment sur lui. Tout le monde lui court sus. Il signifie quelquefois Aller plus vite que le pas. Vous allez trop vite, vous ne marchez pas, vous courez. Il signifie aussi Aller avec empressement. Courir au feu. Je cours le prévenir. Courez, ne perdez pas un instant. Courir au plus pressé, S'occuper, avant toute autre chose, de ce qui importe le plus dans le moment. Fig., Courir après les honneurs, les places, les richesses, la fausse gloire, etc. Courir après des chimères, après des fantômes. Courir à sa perte, à sa ruine. Fig., Courir après l'esprit, Mettre de la recherche, de l'affectation, de l'effort à montrer de l'esprit. Fam., Courir après l'argent, Chercher toutes les occasions de gagner de l'argent. Il ne se dit qu'en mauvaise part. Fam., Courir après son argent, Continuer à jouer pour regagner ce qu'on a perdu. Il signifie aussi Faire des démarches, des poursuites pour recouvrer une somme d'argent qu'on a de la peine à se faire rendre, à se faire payer. Courir à sa fin se dit des Choses qui sont près de finir, qui n'ont pas longtemps à durer. Ma provision de bois court à sa fin. Cette maladie court à sa fin. Il se dit aussi figurément de Toute action précipitée, de tout ce qu'on fait trop vite. Il faut aller bride en main, on ne fait pas les affaires en courant. Il se dit particulièrement d'une Personne qui lit, qui récite, qui prononce, qui écrit ou qui compose trop vite. Lisez doucement, ne courez pas. Il a écrit cela en courant. Il laisse courir sa plume sur le papier. Il signifie encore familièrement Aller çà et là, sans s'arrêter longtemps en chaque endroit. Il ne fait que courir. Il est toujours à courir. Il court depuis le matin jusqu'au soir. Il se dit particulièrement des Courses, des démarches qu'on est obligé de faire pour quelque objet que ce soit. Il a couru toute la journée pour cette affaire. En termes de Marine, il signifie Faire route. Courir au nord. Courir au sud. Transitivement, Courir des bordées, courir des bords, Louvoyer, aller alternativement à droite et à gauche, quand le vent est presque debout. Il se dit particulièrement d'une Côte, d'une terre, d'une montagne, etc., qui se prolonge dans une direction déterminée. Cette côte court de l'est à l'ouest l'espace de trois ou quatre lieues. Ces montagnes courent du nord au sud et partagent de grands continents. Il s'emploie pour Couler, s'écouler. Le ruisseau qui court dans la prairie. Le Rhône court du nord au sud. L'eau qui court. Il se dit figurément du Temps. Le temps court insensiblement. Au temps ou par le temps qui court, Dans le temps présent, dans les circonstances actuelles. Il se dit à propos d'une Rente, des gages, des appointements, etc., pour désigner l'Époque à partir de laquelle ils doivent être comptés. L'intérêt de cette rente court du commencement de l'année. Ses gages, ses appointements courent du milieu du mois. Son loyer court du mois de janvier. Il signifie encore Circuler, se propager, se communiquer ; et, en ce sens, il est souvent impersonnel. Il court des bruits fort désavantageux sur son compte. Faire courir de fausses nouvelles. Une rumeur très alarmante court depuis hier dans le public. Il signifie aussi figurément Être en vogue. La mode qui court. Cette chanson courait par la ville.

COURIR est aussi verbe transitif, alors il signifie Poursuivre à la course avec dessein d'attraper. Il s'emploie surtout en termes de Chasse. Courir le cerf, le lièvre, le daim. Il a droit de courir le cerf sur ses terres. Voyez aussi COURRE. Fig. et fam., Courir le même lièvre se dit de Deux personnes qui sont en concurrence pour la même chose. Prov. et fig., Il ne faut pas courir deux lièvres à la fois, ou Qui court deux lièvres n'en prend aucun, Poursuivre deux affaires à la fois, c'est s'exposer à ne réussir ni dans l'une ni dans l'autre. Fig. et fam., Courir le cachet. Voyez CACHET.

COURIR se dit figurément en parlant des Personnes ou des Choses qu'on recherche avec empressement, qui sont fort en vogue. On ne l'emploie guère qu'au participe passé. Ce prédicateur est fort couru. Ce spectacle est très couru. Il signifie aussi figurément Être exposé à. Courir un danger. Courir risque, courir le risque de, Être en péril de. Il court grand risque de perdre son bien. Courir des chances, courir la chance de..., S'exposer à un risque dans l'espoir d'un avantage. Courir même fortune, Être dans les mêmes intérêts, dans la même situation d'affaires. Courir les aventures se disait des Chevaliers qui allaient à la recherche des exploits guerriers. Il se dit aussi de Quelqu'un qui cherche à se faire un nom ou une fortune par des moyens qui ne sont pas les moyens ordinaires. Il signifie encore Parcourir. J'ai couru toute la ville sans le trouver. Courir les rues. Courir les champs. Courir le pays, Parcourir tel ou tel pays, en vue de le connaître à fond. Courir le monde, Voyager en divers pays par goût d'aventure. Fam., Cette nouvelle, cette aventure, cette histoire court les rues, Elle est sue de tout le monde. L'esprit court les rues, L'esprit est commun, tout le monde en a. Fam., Courir la prétantaine. Voyez PRÉTANTAINE. Pop., Courir le guilledou. Voyez GUILLEDOU. Il signifie également Hanter, fréquenter Courir les buts. Courir les spectacles, les concerts, les maisons de jeu, les mauvais lieux, etc.

Littré (1872-1877)

COURIR (kou-rir), je cours, tu cours, il court, nous courons, vous courez, ils courent ; je courais ; je courus, nous courûmes ; je courrai ; je courrais ; cours, courez, courons ; que je coure, que tu coures, qu'il coure, que nous courions ; que je courusse ; courant ; couru, courue v. n.
  • 1Aller avec une grande vitesse. Où courez-vous ainsi ? Calypso, plus furieuse qu'une lionne à qui on a enlevé ses petits, courait au travers de la forêt, sans suivre aucun chemin, Fénelon, Tél. VII. Les femmes ne sont pas faites pour courir ; quand elles fuient, c'est pour être atteintes, Rousseau, Ém. V. Elle eût, des jeunes blés rasant les verts tapis, Sans plier leur sommet, couru sur les épis, Delille, Énéide, VII.

    Terme de marine. Faire route. Courir au nord, au sud.

    Courir signifie quelquefois s'échapper à la hâte. … Serviteur au portier, Dit-il, et de courir, La Fontaine, Fabl. IX, 10.

    Je cours encore, locution familière, qui s'emploie pour dire : je m'en allai en hâte, on ne m'y rattrapera plus. Cela dit, maître loup s'enfuit et court encor, La Fontaine, Fabl. I, 5. Les dames dirent qu'il ne fallait pas m'importuner ni faire des façons avec moi, et je cours encore, Saint-Simon, 404, 34.

    Courir, pris substantivement. Nier, croire et douter sont à l'homme ce que le courir est au cheval, Pascal, Rel. 8.

    Courir sus à quelqu'un, en termes d'ordonnances, de déclarations, se jeter sur lui pour l'arrêter, pour le tuer. On ordonna de lui courir sus. Et fig. poursuivre, persécuter.

    On dit dans le même sens courir sur. Nous promettons pour cette grâce De sauter pour les gens en place, De courir sur les malheureux, Béranger, Requête.

    Courir sur, faire la course comme corsaire. En leur obtenant du Portugal des commissions pour courir sur les Espagnols, même après qu'ils eurent fait la paix avec la France, Raynal, Hist. phil. XIII, 35.

    On dit dans le même sens courir à. Peuple, vengez mon père et courez à ce traître, Voltaire, Fanat. V, 4.

    Courir s'emploie en une espèce de passif impersonnel, avec le pronom ce. On pourra dire à des enfants qui courent : c'est assez couru, c'est-à-dire ne courez plus.

    Fig. C'est assez couru dans les voies de l'iniquité, Fléchier, Sermons, II, 237.

    Ce n'est pas tout que de courir, il faut partir de bonne heure, c'est-à-dire il ne suffit pas de se hâter, il faut encore se mettre à l'œuvre à temps. Rien ne sert de courir, il faut partir à point ; Le lièvre et la tortue en sont un témoignage, La Fontaine, Fabl. VI, 10.

  • 2Jouter à la course. Ceux qui devaient courir n'attendaient que le signal pour s'élancer dans la carrière. Alexandre ne voulut pas courir dans les jeux olympiques, à moins que des rois n'y courussent.

    Courir se dit aussi des chevaux qui disputent le prix de la course. Faire courir, envoyer des chevaux sur le turf pour y courir.

  • 3 Fig. Et dans cette entreprise il a bien su courir à la nécessité qu'il voyait de mourir, Corneille, Héracl. III, 3. Au tombeau comme au trône on me verra courir, Corneille, ib. IV, 1. Ces prisonniers même avec lui conjurés Sous cette illusion couraient à leur vengeance, Corneille, ib. V, 7. Celle qui vous pressait de courir au baptême, Corneille, Poly. I, 1. Qu'avec plaisir, Philippe, on court à le venger [un ennemi], Lorsqu'on s'y voit forcé par son propre danger, Corneille, Pomp. V, 1. De peur que l'ignorant [sa mort], ce peuple ne se flatte, N'attende encor ce prince et n'ait quelque raison De courir en aveugle à qui prendra son nom, Corneille, Héracl. III, 4. Et je suis en suspens, si, pour me l'acquérir, Aux extrêmes moyens je ne dois point courir, Molière, l'Étour. III, 2. Les esprits courent à vous aimer, Sévigné, 451. Cette mer où tu cours est célèbre en naufrages, Boileau, Ép. I. Ce péril extrême où, pour me secourir, Je vois votre grand cœur aveuglément courir, Corneille, Héracl. I, 4. Qui se venge à demi court lui-même à sa peine, Corneille, Rodog. V, 1. Mais il court à sa perte et vous traîne avec lui, Corneille, Nicom. III, 1. [Il] Tâche à rompre le cours des maux où vous courez, Corneille, Nicom. III, 2. Je veux bien vous guérir D'une erreur dangereuse où vous semblez courir, Corneille, ib. IV, 5. Ma fille qui s'approche et court à son trépas, Racine, Iphig. I, 1. Misérable, tu cours à ta perte infaillible, Racine, Phèd. IV, 3. Jeune peuple, courez à ce maître adorable, Racine, Esth. III, 9. Roxane est offensée et court à la vengeance, Racine, Baj. II, 3. Il vous faudra, seigneur, courir de crime en crime, Racine, Brit. IV, 3. Mais parmi ces périls où je cours pour vous plaire, Racine, Andr. I, 4. Tu murmures, vieillard ! vois ces jeunes mourir, Vois-les marcher, vois-les courir à des morts, il est vrai, glorieuses et belles, Mais sûres cependant et quelquefois cruelles, La Fontaine, Fabl. VIII, 1. On vit alors les courtisans courir au-devant de la réforme, proscrire le luxe de leurs tables, étudier avec empressement les figures de géométrie, Barthélemy, Anach. 33.

    Courir au plus pressé, faire d'abord ce qui est le plus urgent. Ils ont couru au plus sûr, et ont compris que ce serait une folie de vouloir se sauver comme les autres se damnent, Massillon, Car. Salut.

    Courir sur les brisées de quelqu'un, se mettre en rivalité avec lui.

    Courir sur le marché de quelqu'un, enchérir sur lui, tâcher d'obtenir ce qu'un autre a demandé le premier.

    Courir à l'hôpital, se ruiner rapidement par des dépenses excessives.

    Courir à l'évêché, au bâton de maréchal, être en passe d'y parvenir.

  • 4Marcher vite sans précisément courir, aller en hâte, se dépêcher, s'empresser. Vous ne marchez pas, vous courez. Courir aux armes. Tout le pays se souleva et courut aux armes. Mais, quelques jours après, le dieu l'attrapa bien, Envoyant un songe lui dire Qu'un tel trésor était en tel lieu ; l'homme au vœu Courut au trésor comme au feu, La Fontaine, Fabl. IX, 13. [Ils] courent parmi la ville Émouvoir les soldats et le peuple imbécile, Corneille, Sertor. V, 3. Que dit-il quand il voit, avec la mort en trousse, Courir chez un malade un assassin en housse ? Boileau, Sat. VIII. Quand pour le recevoir chacun court sur la rive, Racine, Mithr. II, 1. Pharnace entrait à peine Qu'il courut de ses feux entretenir la reine, Racine, ib. II, 2. Bajazet vit encor ; vizir, courez à lui, Racine, Baj. V, 10. Chère Antigone, allez, courez à ce barbare, Racine, Théb. II, 4. Ma fille dans Argos courait pleurer sa honte, Racine, Iphig. III, 1. Et que m'a fait à moi cette Troie où je cours ? Racine, ib. IV, 6. De l'Inde à l'Hellespont ses esclaves coururent, Racine, Esth. I, 1. Achille va combattre et triomphe en courant, Racine, Iphig. I, 1.

    Fig. Eh bien ! ce stratagème ? - Ah ! comme vous courez ! Ma cervelle toujours marche à pas mesurés, Molière, l'Étour. I, 2. Ah ! de peur de tomber ne courons pas si fort, Molière, ib. IV, 1.

    Il n'y va pas, il y court comme à la noce, il y va avec ardeur, avec joie.

    En termes d'escrime, courir, marcher très rapidement sur son adversaire.

    En courant, à la hâte, d'une manière superficielle, fugitive. Certaines choses que j'avais lues en courant, Sévigné, 613. Il ne les lit pas, ou il ne les lit qu'en courant, Bossuet, Avert. 1.

  • 5Courir après quelqu'un ou quelque chose, aller à sa recherche. Phraate fit courir après Démétrius, Bossuet, Hist. I, 9. Il faut courir, Olympe, après ces inhumains, Racine, Théb. I, 1. Non, il ne courra plus après l'ombre du frère, S'il voit monter la sœur sur le trône du père, Corneille, Héracl. I, 1.

    Fig. Mon cœur court après elle, Racine, Andr. II, 5. En effet il courait après le mensonge, mais il était attiré par quelque lueur de vérité, Fléchier, I, p. 277. Qui ne court après la fortune ? La Fontaine, Fabl. VII, 12. Mon esprit ne court pas après si peu de chose, Molière, l'Étour. III, 3. Le mérite a pour moi des charmes si puissants, que je cours partout après lui, Molière, Préc. 10. Cet air de parure après lequel on court et qu'on n'attrape guère, Hamilton, Gramm. 6.

    Courir après l'esprit, affecter d'en montrer sans trop y réussir.

    Courir après son argent, continuer à jouer pour tâcher de regagner ce qu'on a perdu, et aussi aller relancer ses débiteurs. Il a mieux aimé diminuer son fonds que d'avoir toujours à courir après ses rentes, Rousseau, Hél. VI, 52.

    En un autre sens, courir après l'argent, chercher toutes les occasions d'en gagner.

  • 6Aller et venir çà et là. Il est toujours à courir. L'enragé qu'il était… s'en alla follement… Courir comme un bandit qui n'a ni feu ni lieu, Boileau, Sat. VIII.
  • 7Faire des courses, des démarches. Il a couru toute la journée pour ses affaires. Quand on est candidat, on court plus qu'on ne pense, Delavigne, Éc. des vieillards, I, 5.

    Faire courir quelqu'un, lui faire perdre son temps en courses. L'attention qu'on a de ne pas faire courir les ouvriers, Rousseau, Hél. IV, 10.

  • 8 Terme de commerce. Courir franc, ne rien payer pour salaire d'une négociation.
  • 9Abonder, en parlant de vermine et de petits animaux nuisibles. Les souris courent dans cette maison. Les poux courent sur cette chemise.
  • 10Avoir un mouvement de progression, en parlant des choses. Sa plume courait sur le papier.

    Laisser courir sa plume, se livrer en écrivant au cours de ses idées. Vous avez laissé courir votre plume et donné un essor à votre imagination, Vauvenargues, Dial. Pasc. et Fén.

    Terme de marine. Faire courir une manœuvre dans ses poulies, faciliter le jeu des cordages. On dit que les amarres courent quand elles glissent.

  • 11Couler. Le sang court dans les veines. Cette affreuse sueur qui court sur son visage, Corneille, Rod. V, 4. Et nous faisons courir des ruisseaux de leur sang, Corneille, Cid, IV, 3.
  • 12Être répandu, passer de main en main. Il court parmi le monde un livre abominable, Molière, Mis. V, 1. Outre les copies qui couraient parmi le peuple, Bossuet, Hist. II, 3. J'ai longtemps hésité si je donnerais au public ces panégyriques, et je ne m'y suis enfin déterminé qu'après en avoir vu courir quelques éditions sous mon nom, où je n'avais nulle part, Fléchier, Préf. 53. Vous verrez courir de ma façon dans les belles ruelles deux cents chansons, Molière, Préc. 10. Il y avait d'autres écrits de Picolomini qui couraient dans le monde, Voltaire, Mœurs, 96. Lorsque la comédie du Glorieux fut donnée au théâtre, il courut, contre cette pièce et contre l'auteur, des couplets qui eurent alors toute la vogue passagère assurée aux satires, D'Alembert, Éloges, Destouches. Les billets de ce négociant courent sur la place, on cherche à s'en défaire.

    Faire courir un papier, une brochure, un livre, le remettre à quelqu'un en lui recommandant de le remettre à d'autres et ainsi de suite. Ils firent courir une lettre contre lui, Pascal, Prov. 15. Vient-il de la province une satire fade, Pour la faire courir on dit qu'elle est de moi, Boileau, Épît. VI.

    Faire courir une santé, la faire porter successivement par tous les convives.

    On dit de même : Dans cette réunion, à ce repas, les propos joyeux, les chansons couraient à la ronde. Là courent à la ronde et les propos joyeux Et la vieille romance et les aimables jeux, Delille, Trois règnes, I.

    Faire courir la voix, demander les avis dans une assemblée délibérante. Locution vieillie.

    L'avis qui court, l'avis qui a le plus de voix dans une délibération qui n'est pas encore finie. Locution vieillie.

    Courir se dit aussi des bruits qui circulent, des paroles qui se répandent. Il court de lui un bon mot. Je sais que de ma mort il courut un faux bruit, Corneille, Perthar. IV, 5. Puisque déjà le bruit jusqu'à vous a couru, Corneille, Théod. IV, 5. Et l'on fera courir quelque mauvaise excuse, Dont la cour s'éblouisse et le peuple s'abuse, Corneille, Perthar. III, 2. Ils ont de rang en rang fait courir votre nom, Corneille, Othon, IV, 2. Ce malheureux proverbe qui court dans Paris, Pascal, Prov. 2. Nous fîmes quelques couplets de ces Léridas qui ont tant couru, Hamilton, Gramm. 8. Que dirait-on si le bruit en courait ? La Fontaine, Mandr. Mille bruits en courent à ma honte, Racine, Brit. IV, 2. Déjà jusques au camp le bruit en a couru, Racine, ib.

  • 13En parlant de maladies, sévir d'une façon épidémique. Les maladies qui courent. La scarlatine court dans ce canton, elle a enlevé beaucoup d'enfants. Il courait alors une fièvre dangereuse. Il a couru cette année des dyssenteries.
  • 14Être en voie de, être près d'arriver au terme. Ma provision de bois court à sa fin.
  • 15Se passer, en parlant du temps. L'année qui court. On lui a donné trois mois qui courent à partir de tel jour. Les six mois ne courent qu'à partir du jour de la sommation, Patru, Plaid. 5, dans RICHELET. Ils se repentiront de s'être fait la guerre, Mais avant cette paix il courra bien des mois, Maynard, Poésies, dans RICHELET. Pour moi je le [le temps] vois courir avec horreur et m'apporter en passant l'affreuse vieillesse, les incommodités et enfin la mort, Sévigné, 182. Malgré l'ennui et la fatigue les jours ne laissent pas de passer bien vite ; j'en ai passé de bien douloureux, sans compter les mauvaises nuits ; et cependant rien n'empêchait le temps de courir, Sévigné, 500. La Parque sur nos pas fait courir devant elle Midi, le soir, la nuit et la nuit éternelle, Et par grâce, à nos yeux qu'attend le long sommeil, Laisse voir au matin un regard du soleil, Chénier, Élég. 33. Quand chaque année on est sûr de la suivante, qui peut troubler la paix de celle qui court ? Rousseau, Hél. V, 2.

    Familièrement. Par le temps qui court, d'après ce qui se passe, dans les circonstances où nous sommes. Dans le temps qui court ce n'est pas un petit mérite, Sévigné, 402.

  • 16Être compté, en parlant des intérêts, loyers, appointements. Ses intérêts, ses gages courent depuis un an.
  • 17S'étendre, se prolonger. Le chemin court entre des vignes au bord du lac. Cette côte court est-ouest, c'est-à-dire va droit d'orient en occident. Ces rochers courent sud-ouest, environ trois lieues. L'Asie est soutenue, tant au nord qu'au midi, par deux grandes chaînes de montagnes qui courent presque depuis l'extrémité occidentale de l'Asie Mineure et des bords de la mer Noire, jusqu'à la mer qui baigne les côtes de la Chine et de la Tartarie à l'orient, Raynal, Hist. phil. I, 4.
  • 18 En termes de filature, on dit qu'un fil de laine, de soie, etc. court, quand il fournit beaucoup d'ouvrage.
  • 19 V. a. Poursuivre à la course. Ce n'est pas qu'on s'imagine que la vraie béatitude soit dans le lièvre qu'on court, Pascal, Div. 2. Monseigneur court le lièvre dans son parc, Hamilton, Gramm. 9. Le duc m'a voulu mener courir un cerf avec lui, Molière, les Préc. 12. Il courut un cerf au clair de la lune, Sévigné, 46. Mme la Dauphine se met à courir les bêtes, Sévigné, 437.

    Fig. Ils courent le même lièvre, c'est-à-dire ils prétendent à la même chose.

    Il ne faut pas courir deux lièvres à la fois, c'est-à-dire quand on recherche deux objets à la fois, on les manque l'un et l'autre, il ne faut s'occuper à la fois que d'une chose.

    En parlant des personnes qu'on poursuit. Courir quelqu'un l'épée à la main. Et les petits enfants, sitôt qu'on m'aperçoit, Me courent dans la rue…, Corneille, Suite du Ment. I, 3. L'un d'eux [des secrétaires de Vendôme] le courut [Alberoni] plus de mille pas à coups de bâton à la vue de toute l'armée, Saint-Simon, 156, 41. Mais d'aller attaquer de ces bêtes vilaines Qui n'ont aucun respect pour les faces humaines Et qui courent les gens qui les veulent courir, Molière, Prince d'Él. I, 2.

  • 20 Fig. Rechercher avec empressement. Courir les honneurs. Cet ecclésiastique courait les bénéfices.

    Il se dit des personnes. On le court, on le choie. Ce prédicateur est très couru. Nous les verrions nous courir sans tous ces respects et ces soumissions où les hommes les acoquinent, Molière, la Princ. III, 2. C'est assez qu'elle vous ait vue pour me la faire courir, Sévigné, 111. Se serait-il engagé à Césonie qui l'a tant couru ? La Bruyère, III. Ceux qui courent le favori du prince, comme ses viles créatures, La Bruyère, X. L'on court les malheureux pour les envisager, La Bruyère, VIII. Ils courent partout celles [les femmes] dont ils espèrent se faire écouter, Fontenelle, Jugem. de Pluton. Nous courons quelquefois les hommes qui nous ont imposé par leurs dehors, Vauvenargues, Max. CCLVIII. C'est ce même chevalier que mademoiselle votre fille court aux Tuileries, Dancourt, Cheval. à la mode, V, 7.

  • 21S'exercer dans une lice à différents jeux d'adresse. Courir la bague, la tête, courir en essayant d'atteindre avec une lance une bague, une tête. En Espagne on court les taureaux. Il fallait courir quatre lances ; ceux qui seraient assez heureux pour vaincre quatre chevaliers…, Voltaire, Zadig, 19. [Il] court le faquin, la bague, escrime des fleurets, Régnier, Sat. V.

    Courir un prix, en parlant des courses de chevaux, faire courir un cheval pour avoir ce prix.

  • 22Courir le cachet, se dit d'un professeur qui donne des leçons en ville.
  • 23Parcourir. J'ai couru toute la ville sans le trouver. Je n'ai plus qu'à courir les côtes de l'Afrique, Corneille, Pomp. IV, 3. Tout cassé que je suis, je cours toute la ville, Corneille, Cid, III, 5. On court sans cesse les imprimeries, Pascal, Prov. 17. Hors vous et moi, monsieur, je ne crois pas que personne s'avise de courir maintenant les rues, Molière, Sic. 3. Pour moi, sur cette mer qu'ici-bas nous courons, Je cherche à me pourvoir d'esquifs et d'avirons, à régler mes désirs, à prévenir l'orage, Et sauver, s'il se peut, ma raison du naufrage, Boileau, Ép. V. Je cours tout le sérail, Racine, Baj. V, 9. J'ai couru les deux mers que sépare Corinthe, Racine, Phèd. I, 1. Cher compagnon, me veux-tu croire ? Courons ensemble le pays ; Tu sais médire, je sais boire : Nous ne manquerons point d'amis, La Fontaine, Daphné, III, 10. Il courut tous les environs de Montpellier à plus de dix lieues, et en rapporta des plantes inconnues aux gens même du pays, Fontenelle, Tournefort.

    Être fou à courir les rues, à courir les champs, être très fou.

    Courir le monde, voyager en divers pays. Les philosophes ne courent guère le monde, et ceux qui le courent ne sont ordinairement guère philosophes, et par là un voyage de philosophe est extrêmement précieux, Fontenelle, Tournefort.

    Fig. Mais un roi, vraiment roi, qui, sage en ses projets, Sache en un calme heureux maintenir ses sujets, Il faut pour le trouver courir toute l'histoire, Boileau, Ép. I.

  • 24Courir la poste, voyager en poste, aller fort vite ; et fig. se dépêcher outre mesure.

    On dit dans le même sens courir le grand galop. Il dit fort posément ce dont on n'a que faire, Et court le grand galop quand il est à son fait, Racine, Plaid. III, 3.

    Courir en guide, courir la poste à cheval, ayant devant soi un postillon monté sur un autre cheval.

    Anciennement, courir un bénéfice, envoyer un courrier à celui qui a la nomination d'un bénéfice devenu vacant, pour être le premier à le solliciter.

  • 25 Terme de guerre. Faire une incursion rapide. Courir le plat pays. Les ennemis laissèrent dans la place une garnison qui se mit à courir toute la contrée.
  • 26 Terme de marine. Courir des bordées, ou courir des bords, aller alternativement à droite et à gauche.

    Courir le bon bord, se dit des corsaires qui courent sur des bâtiments marchands ; et fig. et familièrement, fréquenter les mauvais lieux.

    Courir la mer, y faire la course comme corsaire ou pirate. Pour courir cette mer, il ne fallait que des radeaux, des galères et des rameurs, Raynal, Hist. phil. XIX, 5.

  • 27Suivre une profession où l'on a des émules. Courir la carrière littéraire. Une fille guerrière De son guerrier chéri court la noble carrière, Voltaire, Scythes, II, 2.
  • 28Être en train d'accomplir une certaine année de son âge. J'ai l'honneur de courir ma 50e année, Voltaire, Lett. en vers et en prose, 80. Je cours actuellement ma soixante et dix-huitième année, Voltaire, Lett. Richelieu, 18 fév. 1771.
  • 29Courir les aventures, se disait des chevaliers qui allaient à la recherche des exploits guerriers. Son frère, ayant couru mainte haute aventure, Mis maint cerf aux abois, maint sanglier abattu, Fut le premier César que la gent chienne ait eu, La Fontaine, Fabl. VIII, 24.

    Dans un sens général, avoir des aventures, quelles qu'elles soient. Notre héroïne se mit à rêver à ses aventures, particulièrement à celles de cette nuit ; ce n'étaient pas véritablement les plus étranges qu'elle eût courues, La Fontaine, Psyché, I, p. 39. Par extension, être exposé à. Il a couru le risque de périr. Vous courez risque de vous ruiner. Quand je songe aux dangers que je lui fais courir, Corneille, Cinna, I, 2. Il vous a préservé, sur le point de périr, Du danger le plus grand que vous puissiez courir, Corneille, Rodog. V, 5. Et d'ailleurs quels périls peut vous faire courir Une femme mourante et qui cherche à mourir ? Racine, Phèd. I, 1. C'est là tout le danger que vous pouvez courir, Racine, Iphig. II, 1.

    Courir fortune, hasard, s'exposer à certaines éventualités. Il a couru hasard de se tuer. Ils sont trop habiles pour vouloir courir la fortune, Sévigné, 44.

    Courir même fortune, être exposé aux mêmes risques et périls. L. Junius eût couru la même fortune si, pour échapper à la cruauté du tyran, il n'eût feint d'être hébété, et d'avoir perdu l'esprit, Vertot, Révol. rom. I, p. 55. D'où vient qu'ayant voulu courir notre fortune, Il ne partage point l'allégresse commune ? Voltaire, Tancr. V, 1.

    Courir une belle fortune, être en passe d'arriver à quelque chose de grand.

  • 30Hanter, fréquenter. Courir les bals, les maisons de jeu, les théâtres, les salons. À courir les fillettes… Il s'est couvert de dettes, Béranger, Pet. h. gris.

    Courir les ruelles, aller de visite en visite chez les dames.

    Courir le bal, aller au bal. De l'habit dont jadis elle courait le bal, Elle s'est mise en homme en cet accès fatal, Regnard, Fol. amour. III, 9.

    Familièrement. Courir la pretantaine, aller et venir sans objet bien déterminé. Cette femme court la pretantaine, c'est-à-dire ses allées et venues ne sont pas convenables, excitent les soupçons sur sa conduite.

    Populairement. Courir le guilledou, fréquenter, principalement durant la nuit, des lieux suspects.

  • 31Être répandu, propagé. Cette aventure court les salons.

    Courir les rues, être su de tout le monde, être commun, vulgaire. Cette nouvelle court les rues. L'esprit court les rues, il est très commun, tout le monde en a. Honnête homme ! et qui ne l'est pas ? C'est un mérite qui court les rues, Marmontel, Contes mor. Bon mari. Vous trouvez que toute leur capacité et leur étude sur la religion se réduit à certains discours de libertinage qui courent les rues, s'il est permis de parler ainsi, Massillon, Car. Doutes sur la Religion.

  • 32 Terme de marine. Courir les coutures, presser les étoupes qui en ont besoin.

REMARQUE

1. S'en courir a été usité dans le XVIIe siècle. Il s'en court en disant : à Dieu me recommande, Régnier, Sat. X. Mon esprit agité Douteux s'en court de l'une à l'autre extrémité, Régnier, Élég. 2. À la fin le pauvre homme S'en courut chez celui qu'il ne réveillait plus, La Fontaine, Fabl. VIII, 2. L'associé des frais et du plaisir S'en court en haut, La Fontaine, Quiproquo. Ce discours fut à peine proféré Que l'écoutant s'en court…, La Fontaine, aveux. Des grammairiens ont condamné cette locution comme fautive c'est à tort ; elle est aussi correcte que s'en aller ou s'enfuir. Tout ce qu'on peut dire, c'est qu'elle est archaïque et tombée en désuétude.

2. On trouve dans quelques auteurs courir v. n. conjugué avec l'auxiliaire être. Je suis courue ici, Sévigné, 489. J'y suis courue en vain, ç'en était déjà fait, Racine, Théb. V, 2. J'y suis couru, Racine, Bérén. II, 1. Les grammairiens condamnent cet emploi, disant que courir exprimant une action ne peut recevoir l'auxiliaire être. Mais venir exprime aussi une action et ne s'en conjugue pas moins avec l'auxiliaire être. Ici encore l'usage est pour l'auxiliaire avoir ; l'auxiliaire être est très peu usité, mais est également correct ; dans l'ancienne langue il était de plein usage.

3. L'usage trouve cours-je ? trop dur, ou du moins (car courge a le même son et n'est pas rejeté) nous ne sommes pas habitués à renverser ainsi les verbes monosyllabiques ; on tourne la phrase en : est-ce que je cours ?

HISTORIQUE

XIe s. Si s'en commourent tote la gent de Rome ; Plus tost i vint ki plus tost i peut curre, St-Alexis, CIII. [Il] Plus curt à pied que ne fait un cheval, Ch. de Rol. LXIX. Puis sont montez sur leur curanz destriers, ib. LXXXVIII. Son cheval [il] broche, laisse curre à esforz, ib. XCI. Rolant [il] regarde, puis si lui est curut, ib. CLIII.

XIIe s. Li destrier [il] broche, il cort par tel randon…, Ronc. p. 52. Puis [il] laisse corre tout une randonnée, ib. Rolant le vit, sel [si le] corut à aider, ib. p. 96. Par toute Espaigne là où corent mes lois, ib. p. 122. Tres qu'es chevols lui est li brans [l'épée] coru, ib. p. 145. Saisne lui corrent sus par vertu et par ire, Sax. X. L'aigue lui cort du cuer parmi les oilz à rais, ib. X. Jo n'ai pas trait m'espée, ne jo ne li cur sure, Th. le mart. 36. Quant l'arcevesque veit que tuit li curent sure, ib. 107.

XIIIe s. Les larmes de son cuer corrent de tel ravine, Que ses mantaus en mouille et ses bliaus d'ermine, Audefroi le Bastard, Romancero, p. 24. Einsi coururent par mer tant qu'ils vindrent à Cademalée, en un tres pas [cap] qui sied seur mer, Villehardouin, LX. Chascuns i est couru la merveille esgarder, Berte, III. [Une ourse] Qui vers lui s'en venoit courant gueule baée, ib. XLVI. Courant [elle] vint à sa mere, n'i fit pas long delai, ib. LVII. Sachiez, ce jour [il] i ot maint grant destrier couru, ib. CXXXVII. Bruiant et Bernart et Beaucent As armes corent maintenant, Ren. 26940. Que trop par est ma pance plaine ; Au core [à courir] me faudroit [manquerait] l'alaine, ib. 20668. Ausinc cuer qui d'amer ne cesse, Ne queurt pas tous jors d'une lesse, la Rose, 7594. Qui cercheroit jusqu'en Cartage, Et d'Orient en Occident… Et corust tous jors sans paresce, Tant cum porroit, grant aleüre, ib. 5399. Lor nature est que doivent corre Por la gent aidier et secorre, ib. 5201. Ne jà n'aura [le marchand] assés acquis, Se crient [s'il craint] perdre l'avoir acquis, Et queurt après le remanant Dont jà ne se verra tenant, ib. 5093. Onques mès n'avoie veüe Cele iave [eau] qui si bien coroit, ib. 115. Encor apartient au baillif que char soit vendue à droit pris, et les autres viandes, et que droites mesures corgent, Liv. de just. 70. Toutes crient ensemble : Ce soit à Dieu plaisir ! Aus osteus sont corutes por les bordons saisir, Ch. d'Ant. VIII, 471. Et s'el lait l'an et le jor passer, toz li tans sera courus contre li, Beaumanoir, LXV, 17. Autre matiere noz quort sus, si noz soufrerons à tant [nous arrêterons ici], Beaumanoir, XLVI, 12. Il sanlleroit qu'il peust plus laissier du quint de son heritage, se li torfès et les detes ne sont si grant que tout y quore [y passe, y soit employé], Beaumanoir, XII, 6. Une coustume quort entre les procureurs en la cort de crestienté, laquele ne quort pas en cort laie, Beaumanoir, LXV, 83. Quant ce fu fait, il le mistrent en la fosse avec son seigneur et avec le cheval tout vif, et puis lancerent sus la fosse planches bien chevillées, et tout l'ost courut a pierres et à terre, Joinville, 266. Et pour ce la renommée couru en estranges terres, dont maint marcheant lessierent à venir en l'ost [renoncèrent à venir], Joinville, 217. Mort, vielz et jeunes, nous queurt seure ; Mort nous prent, nous ne gardons l'eure, J. de Meung, Tr. 1345.

XIVe s. En la maniere que aucuns servans vistes et hastis qui s'en cuerent executer avant que il aient oÿ tout le commandement, Oresme, Eth. 205. Si comme un cheval quant il queurt bien ou porte bien, il est bon, Oresme, ib. IX, 15.

XVe s. Le comte de Flandre dit : Je m'esmerveille de ces Anglois qui me queurent sus et prennent mon pays…, Froissart, II, II, 207. Et fut la cité de Vennes toute courue et robée [après la prise d'assaut], Froissart, I, I, 199. Si comme renommée keurt, Froissart, II, II, 53. Et passerent là une riviere qui y queurt, qui se fiert en l'Escaut, et vient d'amont devers Arleux…, Froissart, I, I, 79. En priant Dieu, digne pucelle, Qu'il vous doint longue et bonne vie, Qui vous ayme, ma damoiselle, Jà ne coure sur lui envie, Orléans, Bal. 102. C'est qu'entre tous court voix et renommée De pis avoir pour le pueple et l'eglise, Deschamps, Souffrances du peuple. Male bouche tient bien grand court ; Chascun à mesdire estudie ; Faulx amoureux au temps qui court Servent tous de goliardie, Chartier, La belle dame sans merci. Il envoya à Callais trois ou quatre cens hommes qui coururent tout le pays de Boullenoys, Commines, III, 6. Et la riviere couroit entre nous et eux, Commines, VIII, 7. Je vous enjoins que vous gardez de jamais courir votre cheval en la vallée, Louis XI, Nouv. LII.

XVIe s. Plustost le Rosne en contre-mont courra, Marot, I, 225. Lors que la peur aux talons met des ailes, L'homme ne sçait où s'enfuir, ne courre, Marot, III, 8. Ce livre court pieça ez mains des gents d'entendement, Montaigne, I, 206. Ils se coururent sus, l'espée au poing, Montaigne, I, 256. Tout ce qui est soubs le ciel court une loy et fortune pareille, Montaigne, II, 166. Ceulx qui ont abbregé leurs jours à courir toute la terre habitable, Amyot, Préf. VII, 33. Theseus, voulant courir la mesme fortune que feroient ses citoyens, s'offrit voluntairement à y estre envoyé, Amyot, Thesée, 19. Quand ilz furent depuis parvenus en aage d'hommes, ilz coururent sus à Tarchetius, et le desfeirent, Amyot, Rom. 3. Il trouva la riviere si enflée et courant si roide, qu'il ne s'oza approcher du fil de l'eau, Amyot, ib. 4. Aussi tost qu'ilz apperceurent le signe, ils s'en coururent çà et là enlever les filles des Sabins, Amyot, ib. 20. Hieron envoya à la feste des jeux olympiques, des chevaux pour courir, Amyot, Thém. 47. Ici fait son dernier sejour Euchidas qui d'icy courut jusqu'en Delphes, et racourut de là icy en un seul jour, Amyot, Arist. 50. Il soublagea un peu les debteurs, en retranchant partie des usures qui couroient sur eulx, Amyot, César, 48. Dès le printemps de l'année que nous courons, D'Aubigné, Hist. III, 268. Humer et souffler, courir et corner, n'est pas chose à tolerer, Leroux de Lincy, Prov. t. II, p. 305.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

COURIR. Ajoutez :
33Se courir, v. réfl. En termes de turf, se dit du prix disputé dans une course. Le prix du Jockey-club se court à Chantilly sur une piste de 2400 mètres.
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Encyclopédie, 1re édition (1751)

COURIR, en terme de Marine, c’est faire route : on dit courir au nord, courir au sud, pour signifier faire route au nord ou au sud.

Quand on apperçoit à la mer un vaisseau qu’on dit courir à l’est ou à l’ouest, c’est dire qu’il fait route vers l’est ou vers l’ouest. Si l’on dit qu’il court à l’autre bord, il faut entendre qu’il fait une route contraire à celle que tient celui qui le voit.

Courir une bordée, (Marine.) c’est faire route sur un côté, jusqu’à ce qu’on revire pour courir de l’autre côté.

Courir sur la terre, (Marine.) c’est lorsqu’on voit une terre, ou qu’on estime n’en être pas éloigné, on fait route pour s’en approcher.

Courir terre à terre, (Marine.) c’est naviger le long de la côte ; ranger la côte.

Courir le bon bord, (Marine.) c’est une façon de parler de corsaires, pour dire qu’il ne faut attaquer que des vaisseaux marchands, dont la prise peut être bonne & avantageuse.

Courir, la côte court, (Marine.) on se sert de ce mot pour signifier que les terres s’étendent & regnent suivant un certain gissement, ou selon tel air devent.

Lorsqu’on dit qu’une chaîne de roche ou qu’un banc de sable court au sud-ouest deux lieues, c’est dire qu’il s’étend à cette distance sur cet air de vent.

Fais courir, (Marine.) terme de commandement qu’on fait au timonier, pour qu’il fasse porter plein les voiles, ou qu’il n’aille pas au plus près du vent.

Courir sur son ancre, (Marine.) c’est lorsque le vaisseau est porté ou chassé par le vent ou le courant de la mer, du côté où son ancre est mouillée. (Z)

Courir, (Jurisprud.) a dans cette matiere plusieurs significations.

On dit, par exemple, qu’une procédure empêche la peremption ou la prescription de courir.

Il faut une demande expresse pour faire courir les intérêts.

On dit aussi courir un bénéfice, pour dire envoyer à Rome pour l’obtenir. Voyez Course & Course ambitieuse. (A)

Courir, dans le Commerce, a diverses significations.

On dit que les intérêts d’une somme commencent à courir, quand ils commencent à être dûs. Les intérêts des sommes dûes pour marchandises, ne courent que du jour que la demande a été faite en justice par le créancier, & qu’il est intervenu un jugement qui y condamne le débiteur.

Courir sur le marché d’autrui, c’est vouloir avoir une marchandise dont un autre est en marché, en enchérissant sur lui, ou en offrant de meilleures conditions.

Courir franc, terme de négoce d’argent, qui se dit lorsque les agens de banque ne prennent rien pour leur salaire des lettres-de-change qu’ils font fournir pour de l’argent comptant. Dictionn. de Comm. (G)

Courir, (Manége.) c’est faire galoper un cheval de toute sa force. Trop courir un cheval, c’est l’outrer, le faire courir trop vîte & trop long tems. Courir à toutes jambes ou à tombeau ouvert, c’est faire courir son cheval tant qu’il peut. (V)

Courir, v. neut. terme d’ourdissage ; il se dit d’un fil de laine, de soie, de fil, lorsqu’il fournit beaucoup d’étoffe ou d’ouvrage. Il court d’autant plus, qu’il est plus fin.

Courir, se dit aussi en Géographie. Cette suite de montagnes, dit-on, court est-ouest, pour dire qu’elle est dirigée de l’est à l’ouest ; cette côte court entre l’ouest & l’ouest-sud-ouest, pour dire que sa direction est entre l’ouest & l’ouest-sud-ouest, &c. & ainsi des autres. (O)

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Étymologie de « courir »

Bourg. cori ; Berry, courre ; picard, keurir ; provenç. et esp. correr ; ital. correre ; du latin currere. L'ancienne conjugaison est courre, corre, reproduisant l'accent latin cúrrere ; c'est de là que vient le futur, je courr-ai ; s'il venait de courir, il serait je courir-ai, les futurs venant de l'auxiliaire avoir combiné avec l'infinitif. Courir provient d'un changement de la conjugaison latine, currire pour cúrrere, changement qui n'est pas rare.

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(Date à préciser) De l’ancien français courre, corre, issu du latin cŭrrĕre (« courir »), issu de l'indo-européen commun *ḱers- de même sens. L’infinitif de l'ancien français, courre, a été gardé dans l’expression chasse à courre. Ailleurs, il a été remplacé à partir du XIVe siècle, par courir, forme analogique.
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Phonétique du mot « courir »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
courir kurir

Évolution historique de l’usage du mot « courir »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « courir »

  • Courir plus vite que la beauté. Jean Cocteau, Journal d'un inconnu, Grasset
  • Va, cours, vole et nous venge. Pierre Corneille, Le Cid, I, 5, Don Diègue
  • Ceux qui ne marchent que fort lentement peuvent avancer beaucoup davantage, s'ils suivent toujours le droit chemin, que ne font ceux qui courent, et qui s'en éloignent. René Descartes, Discours de la méthode
  • Rien ne sert de courir ; il faut partir à point. Jean de La Fontaine, Fables, le Lièvre et la Tortue
  • Courez vite et songez peu. Benjamin Péret, Le Grand Jeu, le Travail anormal , Gallimard
  • Mieux vaut tenir que courir. De Esope / Fables , 
  • Mieux vaut dormir debout que courir couché. De Ruppert Barnes , 
  • Il faut bien courir après quelque chose... De Nicolas Rey / Courir à trente ans , 
  • Quand on a des opinions courantes, on les laisse courir. De Jules Barbey d’Aurevilly / Pensées détachées , 
  • On ne gagne pas beaucoup à courir le monde. De Proverbe suisse , 
  • L'espérance est un risque à courir. De Georges Bernanos , 
  • Personne ne peut marcher et courir en même temps. De Anonyme , 
  • Rien ne sert de courir On part toujours à temps. De Jean Kerleroux , 
  • Rien ne sert de courir, il suffit d'arriver. De Henri Dreyssé , 
  • On a tort de courir après un passé enfui. De Claude Lelouch / Itinéraire d'un enfant très gâté , 
  • Les petits, on les pend ; les grands on les laisse courir. De Bernhart Herzog , 
  • Il faut hurler avec les loups, si l’on veut courir avec eux. De Proverbe français , 
  • Rarement, à courir le monde, On devient un homme de bien. De François Régnier-Desmarais / Voyage à Munich , 
  • La bonne jument se vend à l'étable. La rosse doit courir les foires. De Proverbe français , 
  • Un septuagénaire peut toujours courir après les femmes à condition de ne pas les attraper. De Anonyme , 
  • Eu égard aux garanties qu’elle présente, seule la notification par voie administrative de l’OQTF sans délai de départ volontaire est de nature à faire courir le délai contentieux spécial de 48 heures.  , Seule la notification en main propre fait courir le délai de recours contentieux contre une OQTF sans délai - Administratif | Dalloz Actualité
  • Raphaël et Aurélie Lecis ont perdu leur fille le jour de sa naissance. Pour surmonter ce deuil périnatal, le papa a décidé de courir, ce dimanche, un marathon qui traversera quelques communes du Douaisis. La Voix du Nord, Lauwin-Planque : ce papa va courir un marathon pour rendre hommage à sa fille décédée le jour de sa naissance
  • La période la plus compliquée s’est éternisée de 3h à 5h du matin. « Je me suis retrouvé seul dans la nuit à courir dans un bois, et je pense que le corps n’est pas fait pour fonctionner comme ça. » Pour autant, l’idée d’envoyer tout valdinguer ne lui a jamais traversé l’esprit. « Seule une blessure m’aurait fait m’arrêter, car je ne voulais pas hypothéquer mes chances de participer au trail corse. » Aussi, il serre les dents, s’accroche et les premiers rayons du soleil lui redonnent un coup de fouet salvateur. , Insolite | Courir pendant 24 h sur une pente des bois d’Œutrange : le défi fou de Sébastien
  • Courir plus vite que la beauté. Jean Cocteau, Journal d'un inconnu, Grasset
  • Va, cours, vole et nous venge. Pierre Corneille, Le Cid, I, 5, Don Diègue
  • Ceux qui ne marchent que fort lentement peuvent avancer beaucoup davantage, s'ils suivent toujours le droit chemin, que ne font ceux qui courent, et qui s'en éloignent. René Descartes, Discours de la méthode
  • Rien ne sert de courir ; il faut partir à point. Jean de La Fontaine, Fables, le Lièvre et la Tortue
  • Courez vite et songez peu. Benjamin Péret, Le Grand Jeu, le Travail anormal , Gallimard

Images d'illustration du mot « courir »

⚠️ Ces images proviennent de Unsplash et n'illustrent pas toujours parfaitement le mot en question.

Traductions du mot « courir »

Langue Traduction
Anglais run
Espagnol correr
Italien correre
Allemand lauf
Chinois
Arabe يركض
Portugais corre
Russe бегать
Japonais 走る
Basque korrika egin
Corse curri
Source : Google Translate API

Synonymes de « courir »

Source : synonymes de courir sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « courir »

Combien de points fait le mot courir au Scrabble ?

Nombre de points du mot courir au scrabble : 8 points

Courir

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