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Couvrir

Définitions de « couvrir »

Trésor de la Langue Française informatisé

COUVRIR1, verbe trans.

I.− [Avec l'idée dominante de superposition]
A.− [Le compl. désigne une chose; un compl. prép. de, plus rarement avec, indique ce qui sert à couvrir] Mettre quelque chose qui est distinct et séparé, mais plus ou moins ajusté, sur une surface ou sur un volume.
1. [De manière à les soustraire à la vue ou à les protéger]
a) [Le suj. désigne une pers.] Couvrir un lit, un mur, une paroi. Une caisse de bois fort, qu'on couvrira d'une toile cirée (Voy. La Pérouse,t. 1, 1797, p. 218).Elle couvrit elle-même la vieille table d'un napperon (Balzac, E. Grandet,1834, p. 58):
1. Après ce petit concert, on couvrit la table d'un tapis de Bergame : à l'un des bouts, M. Bonnefoi commença une partie de dames avec M. Delbeuf, marchand drapier à la Barbe-bleue, tandis qu'à l'autre la maîtresse du logis faisait un cent de piquet avec le premier chantre de Saint-Eustache... Jouy, L'Hermite de la Chaussée d'Antin,t. 2, 1812, p. 205.
P. ext. Couvrir son visage, ses yeux avec ses mains; se couvrir les oreilles. Il couvrait sa figure de ses mains (Mauriac, Génitrix,1923, p. 371):
2. Elle [Cécile] se couvrit le visage de ses mains, se prit à sangloter, puis s'enfuit dans la chambre de nos parents et nous entendîmes, au bruit des clefs, qu'elle s'y enfermait. Duhamel, Chronique des Pasquier,Le Jardin des bêtes sauvages, 1934, p. 27.
b) [Le suj. est un inanimé] S'étendre, se déployer sur une surface de manière à la recouvrir partiellement. Herbe qui couvre un terrain, mer qui couvre le sable, nappe couvrant la table. Un grand tapis d'Aubusson couvre le parquet (Billy, Introïbo,1939, p. 201):
3. ... le prince Castel-Forte le prit par la main, et tirant un rideau de crêpe qui couvrait un autre tableau, il lui montra Corinne telle qu'elle avait voulu se faire peindre cette année... Staël, Corinne,t. 3, 1807, p. 393.
c) Spécialement
HORTIC. Couvrir des semis, des plantes. Étendre sur eux une couverture de protection pour les préserver du froid. Dans ce cas [de gelée forte], on doit se tenir prêt à tout couvrir, et doubler les couvertures des châssis à l'apparition de ces signes (Gressent, Potager mod.,1863, p. 925).
PEINT. Couvrir une toile. Disposer sur sa surface le sujet, lignes et couleurs. Couvrir une toile violemment (cf. Zola, Œuvre,1886, p. 255):
4. ... j'aime que Picasso se dépeigne lui-même le mètre à la main, mesurant les objets les plus vulgaires (...). Leurs images réelles, superposées aux architectures abstraites dont le peintre couvre la toile, sont les tremplins que l'esprit quête pour rebondir dans l'inconnu. Bremond, La Poésie pure,1926, p. 133.
RELIURE. Revêtir d'une reliure, à titre de protection, les plats et le dos de feuilles brochées. Il avait fait couvrir, par un humble relieur de la ville, ses exemplaires avec des feuillets d'antiphonaires (A. France, Anneau améth.,1899, p. 182).
Vx. Couvrir le feu. Mettre de la cendre dessus pour le conserver. Après neuf heures, comme Nicole couvrait le feu (...), deux grands coups retentirent aux volets (Erckm.-Chatr., Hist. paysan,t. 1, 1870, p. 76).
2. [De manière à empêcher qqc. d'être entendu] Couvrir un bruit, un son, le tumulte, la voix. En scène, Rose détaillait si finement une phrase de son duo, que des bravos couvrirent l'orchestre (Zola, Nana,1880, p. 1218).Paroles [qui] (...) couvraient ses ricanements (Montherl., Songe,1922, p. 73):
5. Quelquefois, je ne sais quelle clarté nous faisait entrevoir le sommet d'une vague et parfois aussi le bruit de nos instruments ne couvrait pas le vacarme de l'océan qui se rapprochait. Jacob, Le Cornet à dés,1923, p. 183.
Spéc., MUS. (art du chant). Couvrir une voyelle. Voiler légèrement le timbre de cette voyelle. Dans les ports de voix ascendants, on évitera avec soin d'ouvrir la voyelle; il vaut presque mieux la couvrir légèrement (Garcia, Art chant,1840, p. 13).
3. En partic. Placer quelque chose sur un contenant de manière à le soustraire à l'action du froid, des intempéries, etc.
a) [Le suj. désigne un animé] Obturer au moyen d'un couvercle l'orifice d'un volume creux; édifier un toit au-dessus d'un bâtiment et en revêtir la charpente. Couvrir une casserole, une marmite, un pot; couvrir les halles, un stade; couvrir une maison en tuiles, en ardoises. Elle retira son tablier, couvrit le panier plein, rabattit ses manches et disposa sur sa tête une mantille de dentelle noire (Duhamel, Notaire Havre,1933, p. 141):
6. Il y a du goût à être un homme de la montagne, un de ces hommes qui savent non pas seulement labourer, abattre les arbres, gouverner et panser les bêtes, mais tout : maçonner, boulanger, creuser les sabots, assembler une roue, couvrir un toit en chaume, tout ce qui sert à la vie. Pourrat, Gaspard des Montagnes,La Tour du Levant, 1931, p. 170.
b) [Le suj. désigne un inanimé] Ardoises qui couvrent le toit. Nous n'irons plus à la prière Nous courber sur la simple pierre Qui couvre un rustique tombeau (Lamart., Médit.,1820, p. 219).
B.− [Le compl. d'obj. désigne une ou plusieurs pers., ou leur comportement]
1. Au sens physique
a) [L'obj. désigne le corps ou telle partie du corps; le compl. de moyen désigne ce dont on vêt ou ce qui habille le corps ou telle de ses parties] Poser ou étendre sur quelqu'un une pièce du vêtement ou de l'habillement. Couvrir son cou d'un foulard; couvrir ses mains de gants de laine; couvrir son ventre d'une flanelle; vieillard couvert de lambeaux. Un moine couvert d'un vêtement de bure (Lamart., T. Louverture,1850, II, 3, p. 1287).La vieille bonne (...) lui couvrit [à Jeanne] les épaules d'un gros manteau (Maupass., Une Vie,1883, p. 235):
7. ... et Manitou, pour pouvoir s'entretenir avec le chasseur, tout-à-coup se fit homme. « Que veux-tu faire de cette loutre, lui demanda-t-il? − De sa peau, je couvrirai mes épaules nues, et sa chair ira dans ma chaudière... » Crèvecœur, Voyage dans la Haute-Pensylvanie,t. 2, 1801, p. 8.
b) [Le suj. désigne une pers.] Voiler la nudité d'un corps. Couvrir un nouveau-né, une statue, ses épaules nues :
8. C'est Hypsuranius qui bâtit ces huttes de roseaux où logea la primitive innocence; Usoüs couvrit sa nudité de peaux de bête, et affronta la mer sur un tronc d'arbre, ... Chateaubriand, Génie du christianisme,t. 1, 1803, p. 132.
c) En emploi pronom.
S'habiller chaudement. Se couvrir d'un bon drap, d'un vêtement chaud :
9. − Onze heures moins le quart : le temps de passer à l'hôtel... − Vous n'aurez pas trop chaud pour voyager. − Il faudra même que je me couvre, ce soir, dans l'auto. Mauriac, Thérèse Desqueyroux,1927, p. 282.
Dans la lang. de la conversation. Mettre un chapeau sur sa tête; le replacer sur sa tête après l'avoir soulevé en signe de politesse. Couvrez-vous donc, je vous prie (Labiche, Fourchevif,1859, 3, p. 392).Le général gardait à la main son chapeau, sans vouloir se couvrir (Adam, Enf. Aust.,1902, p. 496).
d) Spéc. [En parlant d'un mâle] Couvrir une femelle, une jument. Synon. saillir :
10. Je passais tout à l'heure avec ma chienne qui portait d'au moins six semaines, même que j'en étais bien ennuyé, à cause qu'elle s'était fait couvrir par un corniaud. Aymé, La Jument verte,1933, p. 219.
2. Au fig.
a) [Le suj. est un nom de pers.] Dérober à la vue, masquer, dissimuler. Couvrir une démarche; couvrir des desseins, des propos. Couvrir une faute (cf. Gide, Faux-monn.,1925, p. 949).Azarius resta empêtré de ses mains, une minute. Puis il couvrit son désappointement par une volte-face (G. Roy, Bonheur occas.,1945, p. 214):
11. ... le duc se hasarda à saisir la main de la Belcredi (...); mais, les cils entre-clos, superbe, et les yeux demi-tournés vers lui, elle faisait ce sourire de sphinx, doux et glacé en même temps, dont elle couvrait et masquait ses plus terribles résolutions. Bourges, Le Crépuscule des dieux,1884, p. 278.
b) [Le suj. est un nom de chose] Servir d'écran pour masquer, dissimuler quelque chose. Mots servant à couvrir des turpitudes. La gaieté des mots couvrait mal sa préoccupation (Estaunié, Empreinte,1896, p. 211):
12. Un soyer au champagne se renversa sur une robe de faille amande, et les fraises, un bout d'orange, glissèrent dans le gravier. La musique redoubla comme pour couvrir cet incident d'un déluge sensuel. Aragon, Les Beaux quartiers,1936, p. 274.
c) Servir de protection à quelqu'un, le garantir contre quelque chose. Couvrir ses amis, le roi, ses subordonnés. Couvrir d'une protection scandaleuse Esterhazy (Clemenceau, Iniquité,1899, p. 59).Nous prenions la responsabilité de ce retard, lui [Samba N'Goto] promettant de la couvrir auprès du terrible Pacha (Gide, Voy. Congo,1927, p. 737):
13. Poincaré avait su à la fois dégager sa responsabilité, garder l'allure de l'homme qui couvrira son ministre de la guerre, et lui indiquer poliment qu'il n'avait qu'à foutre proprement son camp, une merveille. Aragon, Les Beaux quartiers,1936p. 221.
d) Techn. [Avec une idée de garantie dans l'exécution et de protection contre un échec éventuel]
ADMIN. Emploi pronom. réfl. Fuir une responsabilité, la rejeter sur autrui :
14. Il existe deux sortes de fonctionnaires : l'actif et le passif, l'aventureux et le circonspect : le premier n'a qu'un but : « courcircuiter » (comme il dit) les bureaux, c'est-à-dire leur chiper les affaires; le dessein du second, c'est de se « couvrir », c'est-à-dire de s'abriter sous le parapluie des devanciers... Morand, Chroniques de l'homme maigre,1941, p. 142.
ART MILIT. Assurer la protection d'un territoire, d'une ville, d'une armée. Couvrir une ligne de défense, la nation, la retraite. Les Piémontais avaient intérêt à couvrir Turin, et les Autrichiens à couvrir Milan (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène,t. 1, 1823, p. 345).Le 9ecorps couvrira l'attaque depuis Moncel jusqu'à la Moselle (Foch, Mém.,t. 1, 1929, p. 42).
BOXE. Emploi pronom. réfl. Se protéger avec ses gants; se mettre en garde :
15. Il [le « novice amateur »] jette un coup d'œil plein d'angoisse dans la direction du gong libérateur. Et sa garde? Il se couvre! Montherlant, Les Olympiques,1924, p. 328.
COMM. (ventes). Couvrir une enchère. Proposer un prix d'achat supérieur à celui qui vient d'être annoncé par le commissaire-priseur :
16. Cette fois elle [Lise] avait surpris son adversaire [à la vente]. C'était un demi-paysan assis devant Filluzeau. Elle lui asséna un regard hautain, attendit calmement l'extinction du premier feu et couvrit l'enchère ... Lacretelle, Les Hauts ponts,t. 3, 1935, p. 245.
FIN. Disposer du total de la somme demandée; contrebalancer les dépenses. Couvrir ses frais, un emprunt, les intérêts. Recettes ne couvrant plus les dépenses (cf. Bainville, Hist. Fr.,t. 2, 1924, p. 36):
17. Quelquefois ces sacrifices n'étaient même pas suffisants; et Jean-Michel devait, pour couvrir une dette pressante, vendre en secret un meuble, des livres, des souvenirs, auxquels il était attaché. Rolland, Jean-Christophe,Le Matin, 1904, p. 122.
II.− [Avec une idée complémentaire d'étendue]
A.− Parsemer une surface de quelque chose, l'en revêtir avec abondance.
1. [Le suj. est un nom de pers.] Couvrir une table de fleurs, couvrir une nappe de taches, couvrir un vêtement de boue. Il couvre les murs de sa maison d'inscriptions magiques (Fustel de Coul., Cité antique,1864, p. 271):
18. Je songe à Ghirlandajo, accablé d'enfants et de commandes, toujours dépassé par sa production, parlant de couvrir de peintures toutes les murailles de Florence. Faure, L'Esprit des formes,1927, p. 127.
2. [Le suj. se réfère à ce dont la surface est parsemée] Ampoules qui couvrent les mains, sueur qui couvre le front, végétation qui couvre la terre. La mer couvrait au loin cette immense contrée (Dusaulx, Voy. Barège, t. 1, 1796, p. 235).Et pourtant la forêt grandit et couvre la montagne d'une fourrure noire qui distribue dans l'aube ses oiseaux (Saint-Exup., Citad.,1944, p. 634).
3. Plus spéc. Revêtir une page de signes graphiques (dessins, lignes d'écriture). Couvrir les marges d'un livre. Couvrir le papier de sa maladroite et grosse écriture (cf. Bourget, Disciple,1889, p. 122).Je traçai sur l'enveloppe le nom de Gilberte Swann dont je couvrais jadis mes cahiers pour me donner l'illusion de correspondre avec elle (Proust, Sodome,1922, p. 739).
En emploi pronom.
[Le suj. est un nom de pers.] Disposer sur soi en abondance quelque chose ou des choses ayant une valeur ornementale. Se couvrir de bijoux, de bagues, de parfum. Le chef des chefs paroît couvert de pierreries (Chateaubr., Natchez,1826, p. 204).
[En parlant d'une partie du corps] Être envahi par. Se couvrir de boutons; visage qui se couvre de larmes. La figure de Suzette se couvrit des couleurs les plus vives (Fiévée, Dot Suzette,1798, p. 156).
4. Usuel. [En parlant du temps, du ciel] (S')assombrir, (se) voiler. Temps qui se couvre; nuages qui couvraient le ciel. Le ciel se couvrait, les brouillards s'élevaient des prairies, la rivière fumait, le soleil s'éteignait au milieu des vapeurs (Rolland, J.-Chr.,Adolesc., 1905, p. 295).
B.− Au fig.
1. Fixer les yeux sur quelqu'un ou quelque chose, embrasser l'étendue d'un seul tenant. Couvrir qqn d'un rapide regard, couvrir des yeux qqn. Il [M. Douloir] nous couvrait d'un regard affectueux (A. France, Bonnard,1881, p. 340).
2. Donner, dispenser en abondance à quelqu'un des preuves de l'estime, de la tendresse ou du mauvais vouloir qu'on lui porte.
a) [Le compl. de moyen au plur. désigne ces preuves elles-mêmes] Couvrir qqn de bienfaits, de bontés, de compliments; couvrir qqn d'éloges, d'injures :
19. Aussitôt, Berthe environnée d'enfants. − Bonjour, André! dit-elle en dégageant sa main que la petite Annie couvrait de baisers. Chardonne, L'Épithalame,1921, p. 432.
Expr. fig. Couvrir qqn de fleurs. Lui adresser de nombreux compliments. Il devrait me couvrir de fleurs et il me jette à la porte (Duhamel, Combat ombres,1939, p. 224).
b) [Le compl. de moyen au sing. désigne le sentiment de bon ou de mauvais vouloir qui se traduit par des marques ou des témoignages] Couvrir qqn de ridicule, d'un mépris narquois. Couvrir qqn d'une accusation enflammée (cf. Colette, Chatte,1933, p. 153):
20. ... il [Olivier] vivait près d'elles, partagé entre les deux, inquiet, troublé, sentant pour la mère ses ardeurs réveillées et couvrant la fille d'une obscure tendresse. Maupassant, Fort comme la mort,1889, p. 161.
Emploi pronom. [Le suj. est un nom de pers. (ou le nom d'une chose personnifiée)] Acquérir une réputation (bonne ou mauvaise); en attirer à soi les symboles, les marques. Se couvrir de boue, de crimes, de honte; se couvrir de lauriers, de ridicule. Se couvrir de gloire à Craonne (A. France, Pt Pierre,1918, p. 179).
Rem. 1. À noter le subst. masc. couvrement. Protection (supra I B 2 c). Et nos yeux chercheront pour l'âme scélérate Une autre couverture, un autre couvrement (Péguy, Ève, 1913, p. 878). 2. La docum. fournit couvrure, subst. fém., terme de reliure. Opération consistant à recouvrir le dos et les plats du livre avec de la peau ou toute autre matière (cf. Maire, Manuel biblioth., 1896, p. 318).
Prononc. et Orth. : [kuvʀi:ʀ], (je) couvre [ku:vʀ ̥]; couvert, −erte [kuvε:ʀ], fém. [-ε ʀt]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. A. 1. 2emoitié xes. « cacher (quelque chose) en mettant quelque chose dessus » (Passion, éd. d'A. S. Avalle, 185); 1172 fig. (Ch. de Troyes, Lion, éd. M. Roques, 527 : Por ma honte covrir); 1176 par moz coverz (Id., Cligès, éd. M. Roques, 1033); 2. 1835 « rendre (quelque chose, un son) inaudible » (Ac.). B. 1. a) 2emoitié xes. « (d'une chose) être répandu en abondance sur » (Passion, loc. cit., 310); ca 1100 (Roland, éd. J. Bédier, 1084); 1657 au fig. couvrir de gloire, de honte (Pascal, Pensées, section 2, éd. L. Brunschwicg, t. 13, p. 3); b) 2emoitié xiiies. [ms.] pronom., en parlant du temps qui s'obscurcit (Souhaits Saint Martin ds Fabliaux, éd. A. Montaiglon et G. Raynaud, t. 5, p. 202); 2. 1remoitié xiies. « (d'une personne) répandre (quelque chose) en abondance sur » (Ps. Oxford, éd. F. Michel, CXLVI, 8). C. 1. Mil. xies. « (d'une chose) être disposé sur » (Alexis, éd. C. Storey, 346); ca 1570 part. passé subst. « tout ce dont on couvre la table pour un repas » (Carl., V, 12 ds Littré); 2. 1172 « (d'une personne) munir un espace, une maison, d'une couverture, d'un toit » (Ch. de Troyes, Lion, 2349); 3. 1372 [ms. K] « s'accoupler (des animaux) » (Brunet-Latin, Trésor, éd. P. Chabaille, p. 1242, interpolation); 4. 1921 « parcourir (une distance) » (Pesquidoux, Chez nous, p. 122). D. 1. Ca 1165 « (d'une chose) protéger en étant placé dessus » (Rois, éd. R. Curtius, I, 17, p. 32); ca 1160 part. passé subst. masc. « bien abrité d'arbres, abri » (Enéas, éd. Salverda de Grave, 4621); 1844 part. prés. subst. fém. arg. « casquette » (Dict. complet de l'arg., 27); 1896 id. « couverture » (Delesalle, Dict. arg.-fr. et fr.-arg.); 2. ca 1160 « (d'une personne) protéger le corps de quelqu'un (contre les agressions extérieures) (Enéas, loc. cit., 1211); ca 1230 spéc. pronom. « se vêtir » (Eustache le moine, 153 ds T.-L.); ca 1175 au fig. « abriter quelqu'un derrière son nom, son autorité » ici pronom. (Chastellain, Chroniques, éd. K. de Lettenhove, t. 1, p. 22). E. 1793 fin. (Beaumarchais, Époques, p. 117). Du lat. class. cooperire (composé de co et operire), « couvrir entièrement » au propre et au fig.

COUVRIR2, verbe trans.

A.− [Le compl. désigne un espace physique] Parcourir une distance de bout en bout. Couvrir des kilomètres, quelques lieues, les cent mètres en. Couvrir les grandes routes (Staël, Consid. Révol. fr.,t. 1, 1817, p. 342).Couvrir deux encablures (Claudel, Soulier,1944, 1repartie, 2ejournée, 6, p. 1015):
1. « Demain... » se disait-il, s'encourageant à la patience, de même que le promeneur acharné à couvrir une longue distance, d'étape en étape, se propose un but de plus en plus éloigné. « Demain..., après-demain... s'il le faut. » Roy, Bonheur d'occasion,1945, p. 369.
P. ext. Dépasser quelque chose, franchir une limite. Tous les traits majeurs de ma vie ont eu un coin de singularité; mais celui-ci les couvre tous (Beaumarchais, Corresp.,t. 2, 1799, p. 99).
B.− [Le compl. désigne un espace de temps] Embrasser d'un seul tenant une certaine période de temps. Couvrir quinze années, l'histoire de la Restauration, quelques siècles. Quand le provisoire couvre le temps de la vie d'un homme, il est pour cet homme le définitif (Camus, Actuelles I,1944-48, p. 237):
2. Ces complications nous enchantaient. Il [Raoul] nous semblait tisser une toile d'araignée sur l'époque, la couvrir toute. Abellio, Heureux les pacifiques,1946, p. 271.
P. ext. [Le suj., gén. un nom de doctrine, recouvre plusieurs suj. regroupés sous la même étiquette et s'applique également à chacun d'eux] :
3. Ce mot de Kabbale, qui couvre des doctrines en général très peu ou très mal connues, demeure chargé de prestiges et de mystères... Maeterlinck, Le Grand secret,1921, p. 191.
Prononc. et Orth. Cf. couvrir1. Étymol. et Hist. Cf. couvrir1.
STAT. − Couvrir1 et 2. Fréq. abs. littér. : 5 449. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 10 380, b) 7 668; xxes. : a) 7 202, b) 5 875.
BBG. − Gottsch. Redens. 1930, passim.Rickard (P.). Fr. St. 1973, t. 27, no4, p. 503.

Wiktionnaire

Verbe 2 - français

couvrir \ku.vʁiʁ\ transitif 3e groupe (voir la conjugaison)

  1. Parcourir d’un bout à l’autre.
    • Derrière la jetée je mouillais mes ancres, ayant couvert, en trente-trois jours, les dix-huit cents milles qui me séparaient des îles Bermudes. — (Alain Gerbault, À la poursuite du soleil; tome 1 : De New-York à Tahiti, 1929)

Verbe 1 - français

couvrir \ku.vʁiʁ\ transitif 3e groupe (voir la conjugaison) (pronominal : se couvrir)

  1. Garnir, revêtir, pour protéger ou orner en appliquant, en déposant quelque chose.
    • Deux autres aides […] enlevèrent rapidement la camisole de Troppmann, lui placèrent les mains derrière le dos, les lièrent en croix et lui couvrirent le corps de courroies. — (Ivan Tourgueniev, L'Exécution de Troppmann, avril 1870, traduction française de Isaac Pavlovsky, publiée dans ses Souvenirs sur Tourguéneff, Savine, 1887)
    • Ils avaient une maison à eux. […]. Oh ! une vraie cabane ! couverte de chaume, bâtie en pisé, fermée par des volets qui claquaient au vent ; […]. — (Émile Thirion, La Politique au village, page 324, Fischbacher, 1896)
    • Couvrir un véhicule avec la bâche.
  2. Vêtir chaudement.
    • Cet enfant s’enrhumera, vous ne le couvrez pas assez.
  3. Garnir en grande quantité.
    1. En déposant des objets sur quelque chose.
      • Ce cabriolet m’a couvert de boue.
    2. En s'étendant uniformément sur quelque chose.
      • La région que nous parcourons est une vaste plaine monotone, […]. Son sol est formé d'une couche presque ininterrompue d'une terre végétale noire et grasse qui, au printemps, se couvre de blé, d'orge, de maïs, de fèves, de pois chiches. — (Frédéric Weisgerber, Trois mois de campagne au Maroc : étude géographique de la région parcourue, Paris : Ernest Leroux, 1904, page 36)
      • Le thermomètre est descendu à -6° ; tout le gréement était couvert de givre et de glace que je dus casser en montant dans la mâture ; […]. — (Jean-Baptiste Charcot, Dans la mer du Groenland, 1928)
      • Le ciel est huit dixième couvert par cumulus et cumulo-nimbus, et un vent de S.-S.-E. à S.-E. de 60 kilomètres-heure augmente notre vitesse jusqu'à 240 kilomètres-heure. — (Jean Mermoz, Mes Vols, Flammarion, 1937, page 91)
      • La grande forêt des Ardennes est une des plus chargée de mystères. Dans sa partie orientale, elle couvre un plateau accidenté coupé de vallées et de ravins profonds. — (Georges Blond, L'Agonie de l'Allemagne 1944-1945, Fayard, 1952, page 130)
  4. Interposer une chose comme défense ou rempart.
    • Il le couvrit de son corps.
  5. (Militaire) Assurer un tir de suppression pour protéger un élément ami en mouvement.
    • Vas-y, je te couvre !
  6. Cacher.
    • Elle tâchait de couvrir sous ces paroles menaçantes la joie de son cœur.
  7. Pallier ; excuser.
    • Or, c’est bien ça le nœud du problème de la pédophilie dans l’Église catholique: ce n’est pas qu’il y ait des prêtres pédocriminels mais qu’ils aient été couverts continûment par leurs supérieurs. — (Josselin Tricou et Anthony Favier, « Pédocriminalité dans l'église catholique française : une commission parlementaire est indispensable », le 5 octobre 2018, dans Libération (www.liberation.fr))
  8. Effacer, réparer, en parlant des fautes, des manquements.
    • Une amnistie a couvert ce délit.
  9. Dominer, étouffer.
    • Le bruit qui se faisait dans l’assemblée couvrait la voix de l’orateur.
  10. (Commerce) Suffire à.
    • Le produit de la recette n’a pas couvert les frais.
  11. (Biologie) S’accoupler avec la femelle.
    • […] on les met au vert au mois de mars, quand l’herbe est assez grande ; c’est dans cette même saison que l’on fait couvrir les juments, et on a grand soin de leur jeter de l'eau froide sur la croupe, immédiatement après qu’elles ont été couvertes […]. — (Georges-Louis Leclerc de Buffon, Histoire naturelle des animaux, in Œuvres, Bibliothèque de la Pléiade, 2007, page 543)
    • Il s’indigne qu’une fille pauvre choisisse de se faire couvrir par un amant de passage, souvent de connivence avec sa propre mère, dans l’espoir de coiffer dans dix ou onze mois le bonnet enrubanné des nourrices et de trouver chez des riches une bonne place qu’elle gardera peut-être des années, si, plus tard, de nourrice elle est promue bonne d’enfants. — (Marguerite Yourcenar, Souvenirs pieux, 1974, collection Folio, page 35)
  12. (Médias) Relater journalistiquement un événement.
    • Cette manifestation a été largement couverte par les médias.
  13. (Sports hippiques) En parlant d'un cheval dans une course hippique, se rabattre devant un autre.
  14. (Pronominal) (Réfléchi) Se vêtir, s’envelopper.
    • Se couvrir d’un manteau.
    • (Figuré) Se couvrir des apparences, du manteau de la vertu, cacher ses vices sous des apparences d’honnêteté.
  15. (Pronominal) Mettre sur sa tête quelque chose qui coiffe. Absolument : mettre son chapeau.
    • Couvrez-vous, monsieur.
    • Je m’étais souvent arrêté malgré moi, comme saisi par un charme, devant l’ancienne copie qu’en possède à Orsenna la Galerie du Conseil, et devant laquelle un rite séculaire exige qu’on se couvre, en signe d’exécration pour la mémoire d’un traître dont Orsenna porta longtemps le souvenir gravé dans sa chair. — (Julien Gracq, Le Rivage des Syrtes, José Corti, 1951)
    • (Figuré) Se couvrir de lauriers, remporter d’éclatantes victoires.
  16. Rembourser une perte, un dommage.
    • Cela lui était complètement égal, à lui, Rollner, que ces « saloperies » d’assurances refusent désormais de « couvrir » Tellegen. — (Patrick Modiano, Livret de famille, Gallimard, collection Folio, 1977, page 101)
  17. (Pronominal) Être rempli.
    • À partir du mois de juin, la plage, aujourd'hui disparue, se couvrait de tentes pour la saison des bains de mer. — (Frédéric Weisgerber, Au seuil du Maroc Moderne, Institut des Hautes Études Marocaines, Rabat : Les éditions de la porte, 1947, page 19)
    • Je suis plein d'ardeur. J'invente la parité, en lançant la liste « femme, homme » avec laquelle non seulement je vais perdre des voix mais aussi me couvrir de ridicule – on va l'appeler la « liste chabadabada ». — (Michel Rocard, Si la gauche savait, Robert Laffont, 2005)
    • Incapable d'exprimer mes émotions profondes, je pique une crise et je me couvre de ridicule. On dit que le ridicule ne tue pas. Eh bien moi, ça me tue! — (Paul Longpré, Dans le jardin du monde : Chroniques d'un voyage intérieur, Éditions Fides, 1996, page 140)
    • (Figuré) Se couvrir du sang de quelqu’un, le tuer ou le faire tuer.
    • (Figuré) Se couvrir de gloire.
    • Se couvrir de honte. Se couvrir de boue, s’avilir par des bassesses.
    • Le ciel, le temps se couvre de nuages, ou, absolument, le ciel, le temps se couvre, des nuages s’étendent sur le ciel.
  18. (Pronominal) (Militaire) Se défendre, se protéger.
    • Se couvrir d’un bois, d’un retranchement, d’une rivière, s’en faire un abri contre l’ennemi.
  19. (Pronominal) Se cacher sous.
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

COUVRIR. (Je couvre ; nous couvrons. Je couvrais. Je couvris. Je couvrirai. Couvre. Que je couvre. Que je couvrisse. Couvrant. Couvert.) v. tr.
Revêtir une chose de tel ou tel objet, de telle ou telle matière, en vue de la cacher de la conserver, de la fermer, etc. Couvrir un tableau. Couvrir de terre les racines d'un arbre. Couvrir un plat. Couvrir un pot. Couvrir un toit de tuiles, d'ardoises. Couvrir une charrette, un bateau, etc. Se couvrir la tête, le visage. Une statue couverte d'un voile. On le dit aussi des Choses avec lesquelles on en couvre d'autres. Le voile qui couvre ce tableau, cette statue. On enleva la terre qui couvrait le cercueil. Couvrir une maison, Y poser la toiture. Couvrir le feu, Mettre de la cendre dessus pour le conserver. En termes de Jeu, Couvrir une carte, Mettre une carte sur une autre ou Mettre de l'argent sur sa carte. Pays couvert, Rempli de bois. Allée couverte, Allée en berceau. Il signifie aussi Garnir d'un vêtement. Cet enfant s'enrhumera, vous ne le couvrez pas assez. Cette femme est si pauvre qu'elle n'a pas de quoi se couvrir. Il faut avoir soin de se bien couvrir en hiver. Par extension, Les vêtements qui le couvrent sont usés. Être bien couvert, Être bien et chaudement vêtu.

SE COUVRIR signifie spécialement Mettre son chapeau sur sa tête en parlant d'un Homme. Il se couvrit le premier. Couvrez-vous, monsieur.

COUVRIR signifie encore Garnir d'une chose en grande quantité. Couvrir une table de mets. Il vint un obus qui le couvrit de terre. Cette voiture m'a couvert de boue. Se couvrir de diamants, de pierreries. Fig., Son discours fut couvert d'applaudissements. Il fut couvert de huées, d'injures. Être couvert de honte, de confusion. Se couvrir de gloire. Se couvrir de boue, S'avilir par des actions basses, infâmes, tomber dans le dernier mépris. Couvrir d'or quelqu'un, Le payer très largement. Il signifie encore Garnir en s'étendant, en se répandant dessus. Les eaux débordées couvrirent en un moment toute la campagne. Une rougeur subite couvrit son visage. D'épaisses ténèbres couvrirent l'horizon. Ces ruines couvrent un espace de plusieurs lieues. Une foule immense couvrait la place publique. Enlevez la poussière qui couvre ce tableau. La pâleur qui couvrait son visage. Une lèpre hideuse couvrait tout son corps. Il était couvert de sueur, tout couvert de sang et de poussière. La terre est couverte de neige. Par analogie, on dit, en termes d'Automobilisme, Cette auto a couvert tant de kilomètres, Elle les a parcourus. Il fait un temps couvert, se dit quand le ciel est couvert de nuages. Le ciel, le temps se couvre, l'horizon se couvre, Il se brouille, s'obscurcit par des nuages. Le temps commence à se couvrir. Fig., L'horizon se couvre, Il survient des obstacles ; de graves événements se préparent. Il signifie en outre figurément Cacher, dissimuler. Il couvre bien son jeu. Cette modestie apparente couvre une grande vanité. Le vice cherche quelquefois à se couvrir des apparences de la vertu. En termes de Guerre, Couvrir sa marche, Cacher sa marche, la dérober à l'ennemi, la protéger. Un bon général doit savoir couvrir sa marche. Il signifie figurément Cacher ses desseins, aller adroitement à ses fins. Un propriétaire est obligé de tenir son locataire clos et couvert, Il est obligé de lui donner et de lui entretenir son logement en bon état de clôture et de couverture. Fig. et fam., Se tenir clos et couvert, Se tenir en lieu de sûreté, de peur d'être pris. On le cherche pour l'emprisonner, il se tiendra clos et couvert durant quelques jours. En termes de Fortification, Chemin couvert, Chemin sur le bord extérieur du fossé et où le soldat est à couvert du feu des assiégeants. Fig., À mots couverts, Avec discrétion, en termes voilés. Il signifie également Excuser, faire pardonner, pallier. On pourrait couvrir sa faute, en disant que... Quelques beautés ne sauraient couvrir les nombreux défauts de cet ouvrage. Se couvrir d'un prétexte. Ce crime a été couvert par l'amnistie, On ne peut plus en poursuivre l'auteur, parce qu'il a été amnistié. Il signifie encore Garantir, mettre à l'abri. Il se jeta devant son officier et le couvrit de son corps. Se couvrir de son bouclier. Fig., Couvrir quelqu'un de sa protection, de sa faveur, ou simplement couvrir quelqu'un, couvrir ses subordonnés, Assumer la responsabilité de ce qu'ils ont pu faire. Se couvrir d'un grand nom, d'un vain titre, de l'autorité de quelqu'un. Par extension, Se couvrir de son épée, Se servir assez adroitement de son épée pour mettre à couvert et défendre à la fois toutes les parties de son corps. Absolument, en termes d'Escrime, Se couvrir, Tenir la pointe de l'épée de son adversaire hors de la ligne du corps. Il signifie particulièrement, en termes de Guerre, Protéger, défendre. La citadelle couvre la ville. Un corps de trente mille hommes couvrait nos frontières de ce côté. Couvrir la retraite. Se couvrir d'un bois, d'une colline, d'une éminence, d'un marais, etc., Se poster près d'un bois, d'un marais, etc., en sorte qu'on ne puisse être attaqué que difficilement de ce côté-là. Il se dit aussi d'un Son ou d'un Bruit qui en domine un autre et ne permet pas de l'entendre ou de le distinguer. Le bruit qui se faisait dans l'assemblée couvrit entièrement la voix de l'orateur. L'orchestre couvre la voix des chanteurs. Le fracas du tonnerre couvrait le bruit de la cascade. En termes de Banque et de Bourse, il signifie Garantir, donner une couverture. Pour que nous fassions cette opération, il faut que vous nous couvriez. Il se dit encore, au figuré, de Ce qui indemnise des frais, des dépenses qu'on a faites dans quelque entreprise. Le produit de la recette est à peine suffisant pour couvrir les frais. Par extension, en termes de Finance, Couvrir un emprunt, couvrir une souscription. Donner aux emprunteurs, aux promoteurs de la souscription tout l'argent qu'ils demandent. L'emprunt a été couvert plusieurs fois, Le public a donné plusieurs fois la somme qui lui était demandée. En termes de Jurisprudence, Couvrir la prescription, L'interrompre. On dit aussi Couvrir la péremption, couvrir une fin de non-recevoir, une nullité, Faire qu'elle ne puisse plus être opposée. Couvrir une enchère, Enchérir au-dessus de quelqu'un. Il se dit encore des Animaux qui s'accouplent avec leurs femelles. C'est un cheval anglais qui a couvert cette jument. Cette chienne a été couverte d'un épagneul, par un épagneul.

Littré (1872-1877)

COUVRIR (kou-vrir), je couvre, nous couvrons ; je couvrais ; je couvris ; je couvrirai ; je couvrirais ; couvre, couvrons ; que je couvre, que nous couvrions ; que je couvrisse ; couvrant ; couvert v. a.
  • 1Garantir à l'aide d'une chose qu'on étend ou met sur une autre Couvrir une voiture avec la bâche. Qu'il voie que tous les hommes portent à peu près le même masque, mais qu'il sache aussi qu'il y a des visages plus beaux que le masque qui les couvre, Rousseau, Ém. IV.

    Se couvrir, couvrir à soi. Elle s'était couvert la tête de son voile. La jeune fille se mit à pleurer en se couvrant le visage, Rousseau, Lévite d'Éphr. ch. I.

    Mettre le couvercle. Couvrir la marmite.

    Garnir d'un toit. Couvrir une maison en ardoises, en tuiles.

    Envelopper. Couvrir un livre. Couvrir un canapé de toile de Perse.

    Terme de jeu de dames. Couvrir une dame, mettre une dame sur celle qui est arrivée à dame.

    Terme de trictrac. Couvrir une dame, mettre sur une flèche une seconde dame pour empêcher que la première ne soit battue.

    Terme de domino. Couvrir un dé, adapter à un dé posé un autre dé qui manque à l'adversaire.

    Terme de jeux de carte. Couvrir une carte, mettre une carte sur une autre. Couvrir une carte, mettre de l'argent dessus. Couvrir un momon, accepter le défi d'un momon (voy. MOMON).

    Par exagération, couvrir d'or un tableau, un manuscrit rare, en donner un prix excessif.

    Terme de banque et de bourse. Donner une couverture, offrir des garanties.

    Couvrir le feu, mettre de la cendre dessus pour le conserver.

    Populairement. Couvrir la joue à quelqu'un, lui donner un soufflet.

  • 2Couvrir les pauvres, leur donner des vêtements.

    Couvrir quelqu'un, augmenter ses vêtements pour qu'il n'ait pas froid. Cet enfant s'enrhumera, vous ne le couvrez pas assez.

    Couvrir un malade, augmenter ses couvertures, pour qu'il n'ait pas froid ou pour qu'il sue.

  • 3Charger, remplir à l'extérieur. Couvrir un habit d'or. Ce cabriolet m'a couvert de boue. Les Anglais couvrirent la mer de leurs vaisseaux. Je couvrirai plafonds, voûte, voussure Par cent magots…, Voltaire, Goût. Ce fut lui qui voulut que son fils, encore enfant, montât sur l'échafaud et qui lui dit : Soyez couvert de mon sang, et apprenez à mourir pour vos rois, Voltaire, Louis XV, 25.

    Couvrir les bougies, y mettre la dernière couche, en les attachant par la tête au cerceau.

    Couvrir les perles, enduire d'essence d'Orient l'intérieur des perles factices.

    Fig. Couvrir de honte. Cette action le couvrit de honte. Il ne lui sera pas difficile de couvrir de confusion de simples particuliers comme vous et vos jésuites, qui, par un attentat criminel, usurpent l'autorité de l'Église, Pascal, Prov. 12, Défense. Son infâme Antinoüs, dont il fit un Dieu, couvre de honte toute sa vie [de l'empereur Adrien], Bossuet, Hist. I, 10.

  • 4Être répandu sur, être étendu sur. Une foule nombreuse couvrait les rues et les places. Quand de tels gens couvriront vos remparts, Je vous dirai : dormez, poëtes picards ; Devers la Somme on est en assurance ; Devers le Rhin tout va bien pour la France, La Fontaine, Poésies mêlées, XLI. Où se peuvent cacher tes saints ? Les pécheurs couvrent la terre, Racine, Athal. II, 9. La rougeur me couvre le visage, Racine, Phèd. I, 3. Tout imita Paris [lors de la St-Barthélemy] ; la mort, sans résistance, Couvrit en un moment la face de la France, Voltaire, Henr. II. Ce sont les vignes qui couvrent principalement les campagnes voisines de la capitale, Raynal, Hist. phil. II, 18. Aucun physicien ne doute aujourd'hui que la mer n'ait couvert une grande partie de la terre habitée, D'Alembert, Abus de la crit. Œuvres, t. IV, p. 256, dans POUGENS. Kutusof, plus confiant dans ses canons que dans ses soldats, ne cherchait à vaincre que de loin ; ses feux couvraient tellement tout le terrain occupé par les Français, que le même boulet qui renversait un homme du premier rang allait tuer sur les dernières voitures les femmes fugitives de Moscou, Ségur, Hist de Nap. X, 8.

    Absolument. On dit qu'une encre couvre, quand elle a une bonne teinte noire sur le papier qu'on imprime.

  • 5Interposer une chose comme défense ou rempart. Il le couvrit de son corps. L'armée qui nous couvrait des ennemis était invincible, La Bruyère, XII. La plus grande partie de la cavalerie, bardée de fer, couvrait le front de cette aile droite, Rollin, Hist. anc. Œuvres, t. X, p. 219, dans POUGENS. Ces forces destinées à couvrir les établissements de leur nation, à détruire ceux de leur ennemi, étaient plus que suffisantes pour ce double objet, Raynal, Hist. phil. IV, 23. Les montagnes de Norvège sont des boulevards admirables qui couvrent de ce vent les pays du Nord, Montesquieu, Esp. XVII, 3. Elles couvriront les racines des ardeurs du soleil, Montesquieu, Arsace et Ism. En même temps que sur son flanc droit le maréchal se fait un rempart de ces malheureux, il a regagné les bords du Dniéper, dont il couvre son flanc gauche, et il marche entre deux s'avançant ainsi de bois en bois, de plis de terrain en plis de terrain, profitant de toutes les sinuosités, des moindres accidents du sol, Ségur, Hist. de Nap. X, 9.

    Terme militaire. Couvrir un siége, empêcher que l'ennemi ne le fasse lever. Couvrir ses derrières, empêcher que l'ennemi ne puisse inquiéter l'arrière-garde ou couper les communications.

    Terme de marine. Un vaisseau en couvre un autre quand il se place, dans un combat, entre ce vaisseau attaqué et l'ennemi.

    Le pavillon couvre la marchandise, c'est-à-dire que, par exemple, un navire de commerce sous pavillon français ne peut être visité par aucun vaisseau de guerre d'une autre nation.

    Fig. Couvrir quelqu'un de sa protection. Nous pourrons tous les deux, empressés à lui plaire, Couvrir de nos respects la vieillesse d'un père, Ducis, Abuf. III, 2.

  • 6Cacher. Le voile de la nature qui couvre Dieu, Pascal, dans COUSIN. Toutes choses couvrent quelque mystère ; toutes choses sont des voiles qui couvrent Dieu, Pascal, ib. Dieu ne sort du secret de la nature qui le couvre, Pascal, ib. Les affections temporelles couvrent les biens spirituels où elles conduisent ; les joies temporelles couvrent les maux éternels qu'elles causent, Pascal, ib. Vous le couvrez [le moi], vous ne l'ôtez pas pour cela, Pascal, ib. Étant jeune, j'ai su bien user des plaisirs ; Ores j'ai d'autres soins en semblables désirs ; Je veux passer mon temps et couvrir le mystère, Régnier, Sat. XII. Et ce masque trompeur de fausse hardiesse Nous déguise sa crainte et couvre sa faiblesse, Corneille, Nicom. III, 4. Qui, pour perdre quelqu'un, couvrent insolemment De l'intérêt du ciel leur fier ressentiment, Molière, Tart. I, 6. Couvrons à l'infidèle un vif ressentiment, Molière, D. Garcie, II, 4. L'amour-propre que l'on couvre du beau nom de l'amour de la vérité, Sévigné, 96. D'un appareil d'hymen couvrant ce sacrifice, Racine, Iphig. III, 6. Je me suis tu cinq ans ; et jusques à ce jour D'un voile d'amitié j'ai couvert mon amour, Racine, Bérén. I, 2. Elle tâchait de couvrir sous ces paroles menaçantes la joie de son cœur, Fénelon, Tél. I. Le feu qu'il porte dans son cœur est couvert sous de viles apparences, Massillon, Car. Resp. Le ciel, qui dans mes mains a remis votre enfance, D'une profonde nuit couvre votre naissance, Voltaire, Œdipe, V, 2. Couvre plutôt ce nom d'un éternel silence, Lemercier, Idom. II, 4. La loi était presque anéantie ; elle fut couverte par [disparut sous] l'opulence de la cité, Montesquieu, Esp. 27. Ces exemples nous montrent combien une religion mal entendue, qui couvre du nom respectable de la divinité les plus grands crimes, est capable de faire illusion à l'esprit humain, Rollin, Hist. anc. Œuvres, t. V, p. 15, dans POUGENS. Couvrant leurs intérêts de l'intérêt des cieux, Voltaire, Henr. II.

    Terme militaire. Couvrir sa marche, la cacher, la dérober à l'ennemi.

    Par extension. Ils [les chats] savent couvrir leur marche, dissimuler leur dessein, Buffon, Chat.

    Fig. Couvrir sa marche, cacher sa conduite, ses démarches, ses vues, etc. Tantôt couvrant sa marche et ses finesses, La Fontaine, Conf.

    Couvrir son jeu, tenir les cartes que l'on a en main, de manière qu'elles ne soient pas vues des autres joueurs ; et fig. cacher ses intentions, ses actions. Il faut avouer que M. le cardinal Mazarin joua et couvrit très bien son jeu en cette rencontre, Retz, Mém. liv. II, p. 440, dans POUGENS.

  • 7Pallier, excuser… Un adroit mensonge à couvrir le forfait, Corneille, Héracl. II, 2. Ciel ! faut-il que le rang dont on veut tout couvrir, De cent sots tous les jours nous oblige à souffrir ! Molière, Fâch. I, 6. Non, vous voulez en vain couvrir son attentat, Racine, Phèd. V, 3. D'un voile d'équité couvrant mon injustice, Racine, Andr. IV, 5. Sa haute réputation et l'éclat de ses victoires couvrirent ces irrégularités, Vertot, Révol. rom. XI, p. 145. On blâme les faveurs dont vous couvrez leurs crimes, Delavigne, Vêpres sicil. II, 2. Mais quelles qualités purent jamais couvrir les vices qui le rendirent l'objet de la haine de ses sujets ? Rollin, Hist. anc. Œuvres, t. V, p. 231. L'agrément couvre tout, il rend tout légitime ; Aujourd'hui dans le monde on ne connaît qu'un crime, C'est l'ennui…, Gresset, Méchant, IV, 7.
  • 8Effacer, réparer, en parlant des fautes, des manquements. Une amnistie a couvert ce délit. Un mariage subséquent couvre le défaut de naissance des enfants.

    Terme de pratique. Couvrir la prescription, l'interrompre. Couvrir une nullité, l'écarter de manière qu'elle ne puisse plus être opposée.

    Couvrir un crime, s'est dit quelquefois dans un sens analogue.

  • 9Dominer, étouffer. Le bruit qui se faisait dans l'assemblée couvrait la voix de l'orateur. Il [le poëte] n'a qu'à dire un mot pour couvrir nos voix grêles, Comme un char en passant couvre le bruit des ailes De mille moucherons, Hugo, F. d'aut. 11.
  • 10 Terme de commerce. Suffire à. Le produit de la recette n'a pas couvert les frais.
  • 11Couvrir une enchère, enchérir au-dessus de quelqu'un.
  • 12En parlant des animaux, s'accoupler avec la femelle. Lorsque les brebis étaient couvertes par les mâles, Voltaire, Phil. IV, 85.
  • 13Se couvrir, v. réfl. Se vêtir, s'envelopper. Se couvrir d'un manteau. La fière Fulvie Se couvre, sans rougir, d'un vil déguisement, Voltaire, Catil. II, 1.

    Mettre un vêtement qui garantisse du froid. Il fait froid, il faut se couvrir davantage.

    Fig. Se couvrir d'un sac mouillé, apporter de méchantes excuses.

    Se couvrir de diamants, s'en parer avec profusion.

    Fig. Se couvrir des apparences, du manteau de la vertu, cacher ses vices sous des apparences d'honnêteté.

  • 14Mettre sur sa tête quelque chose qui coiffe. Venez du diadème à leurs yeux vous couvrir, Racine, Athal. IV, 5.

    Absolument. Mettre son chapeau. Couvrez-vous, monsieur. Henri IV, à l'audience qu'il donna à Dom Pèdre de Tolède, le 3 juillet 1608, dit aux maréchaux de France et aux ducs de se couvrir, voyant que cet ambassadeur entrait et s'avançait sans se découvrir, Saint-Foix, Ess. Paris, Œuvres, t. IV, p. 362, dans POUGENS.

    Fig. Se couvrir de lauriers, remporter d'éclatantes victoires. Assez d'autres viendront à mes ordres soumis Se couvrir des lauriers qui vous furent promis, Racine, Iphig. IV, 6.

  • 15Être rempli. La place se couvrit de curieux. Voyez comme son visage se couvre d'une rougeur subite. La terre se couvre de verdure. Ses sept collines Se couvrent à vos yeux de meurtres, de ruines, Voltaire, Catil. IV, 3. Ses yeux se couvrirent à l'instant d'un épais nuage semblable à celui de la mort, Fénelon, Tél. VII.

    Avec ellipse du pronom se. Le héros, à ce discours flatteur, Sentit couvrir son front d'une noble rougeur, Voltaire, Henr. III.

    Se couvrir du sang de quelqu'un, le tuer ou le faire tuer.

    Fig. Se couvrir de gloire. Se couvrir de honte. Se couvrir de boue, s'avilir par des bassesses. L'accepter [la vie], ce serait me couvrir d'infamie, Voltaire, Catil. V, 6.

    Le ciel, le temps se couvre de nuages, ou, absolument, le ciel, le temps se couvre, des nuages s'étendent sur le ciel. Allons, rentrons ici ; j'ai changé de pensée ; et puis le temps se couvre un peu, Molière, Sicil. 10.

    Fig. L'horizon se couvre, il survient des obstacles, des circonstances difficiles.

  • 16 Terme de guerre. Se couvrir d'un bois, d'un retranchement, d'une rivière, s'en faire un abri contre l'ennemi. On remarquera dans le campement de Chatenoy l'éminence qu'occupa ce grand capitaine et le ruisseau dont il se couvrit sous le canon du retranchement de Selestadt, Bossuet, Louis de Bourbon.

    Terme d'escrime. Se couvrir, tenir la pointe de l'épée de son adversaire hors de la ligne du corps. Se couvrir de son épée, manier si adroitement son épée qu'on défende contre les coups toutes les parties de son corps.

    Par extension, se défendre, se protéger. Ils leur laissent à peine au bout de dix années, Pour se couvrir de nous, l'ombre des Pyrénées, Corneille, Sertor. II, 1. Ceux qui se couvraient de l'autorité de la loi civile, Bossuet, Usure. En vain vous vous couvrez des vertus de vos pères, Boileau, Sat. V.

    Absolument, au trictrac, se couvrir, placer une seconde dame sur une flèche qui n'en avait qu'une.

  • 16Se couvrir de, se cacher sous. Il [Jésus] s'est encore plus caché en se couvrant de l'humanité, Pascal, dans COUSIN. Le désir de vaincre est si naturel, que, quand il se couvre du désir de faire triompher la vérité, on prend souvent l'un pour l'autre, Pascal, ib.

HISTORIQUE

XIe s. Qui fut cuvert d'un paile alexandrin, Ch. de Rol. XXXIV. Cuvert en sont li val et les montagnes, ib. LXXXIV.

XIIe s. Et son cheval [il] fait enseler et covrir, Ronc. p. 55. Al segnor chi covre le ciel de nues e aprested à la terre pluvie, Liber psalm. p. 227. Ou cil qui aint [aime] du cuer à son pooir Et ne s'en sait mie très bien couvrir [cacher], Couci, X. [Au temps] Que bois et prés sont de mainte semblance, Vert et vermeil, couvert d'erbe et de flor, ib. XVI. Ä icel jour [vous] serez tuit mal bailli, Se sa pitié [de Dieu] ne cuevre sa puissance, Quesnes, Romancero, p. 97. E covrit confusiun la meie face, Liber psalm. p. 88. Reis esteit, e evesques voleit estre altresi ; Deus s'en est coreciez, de liepre le covri, Th. le mart. 75. E tutes lur funteines estuperez ; et tuz lur champs de pierres cuverez, Rois, 353.

XIIIe s. [Rue qui] ne fust toute couverte de dras très richement, Berte, IX. Au lit au roi Pepin [elle] fait sa fille couvrir [mettre sous les couvertures], ib. XII. [Il] n'i ot fors [que] buissonciaus où du vent [elle] s'est couverte, ib. XXX. Comment le peuvent-il avoir ainsi couvert [caché le meurtre] ? ib. XCIII. Et la damoisiele fu renvoiie dechà mer, et arriva en Pontiu ; et là, couvri son grant pieché, et ne s'osoit demonstrer au roi Felippe son frere, Chr. de Rains, p. 13. Compainz, compainz, ce doivent querre Cil qui sunt en aperte guerre ; Mès MaleBouche est trop couvers, Il n'est mie anemis ouvers, la Rose, 7859. En ung destor fu li cuivers [perfide] D'erbes et de fuelles couvers, Por ceus espier et sorprendre Qu'il voit as roses la main tendre, ib. 2841. La joie del retor lui cuevre Le pensé dont il est en doute, Lai de l'ombre. Sens est perdus qui est couvers [caché], Lai d'Ignaur. Mais la fame si bien se cuevre, Ne ja n'i sera descouverte, Devant qu'ele soit espousée, la Rose, 8712. Coment et de quei les chevaus deivent estre covers, Ass. de J. I, 165. Et après, quant li commun veut avoir conte, il se queuvrent qu'il ont conté li uns à l'autre, Beaumanoir, L, 7. Quant [je] voi ces oisiaus esjoïr Por la douçor de la saison, Lors [je] chant por ma dolor covrir, Hist. litt. t. XXIII, p. 749. Pour couvrir sa desloyauté, et pour geter le blasme sur le calife de la prise de la ville, Joinville, 278. Et quant ce vient après la Saint Remy, les sept rivieres s'espandent par le païs et cuevrent les terres pleinnes [les plaines], Joinville, 219. Toute sa gent qui estoient mal armées, il les envoia par une valée couverte, Joinville, 271.

XIVe s. Le gouvernement des princes françois [titre d'un livre], couvert de cuir blanc à queue, De Laborde, Émaux, p. 232.

XVe s. Et jà estoient les tables couvertes en la chambre mesme ; adonc demanda il l'eau pour laver, Froissart, III, IV, 23. Par ma foi, respondirent aucuns, sire, malement pouvons-nous savoir, car les Anglois sont couverts quelle chose ils feront ni où ils se trairont, Froissart, II, III, 34. Ils [les brigands] espioient une bonne ville ou un bon chastel ; et puis s'assembloient vingt ou trente brigands, et s'en aloient tant de jour que de nuit, par voies couvertes, que ils entroient en celle ville droit sur le point du jour, Froissart, I, I, 324. Il doubtoit plus la guerre couverte que la guerre ouverte, Bouciq. III, ch. 18. Les raisons que sçauroye alleguer en ceste matiere ne sçauroyent couvrir la faute de foy et d'honneur que le duc commist, Commines, V, 6. Beau souper fut en haste couvert et servi, Louis XI, Nouv. I. Lors, un d'entre eux couvrit la table et mit le banquet dessus, Louis XI, ib. XXIX. Elles se bouterent en une chambre au plus près où elles avoient fait couvrir chacune son lit, Louis XI, ib. XX. Bien viengne le roi Perceforest qui a garanty et couvert le mauvais pays de ceste forest, Perceforest, t. I, f° 29.

XVIe s. Haine esmeut contention, mais charité couvre toutes iniquitez, Calvin, Instit. 519. Couvert de sang et de playes, Montaigne, I, 4. Se couvrir des maulx et inconvenients qui nous menacent, Montaigne, I, 48. Aller la teste couverte, Montaigne, I, 259. Ils alloient à la guerre obscurement couverts et sans atour imperial, Montaigne, I, 354. Il ne leur avoit jamais dit de qui ilz estoient filz, sinon en parolles couvertes, Amyot, Rom. 10. Il y proceda par voye couverte, Amyot, Lyc. 13. Ilz faisoient couvrir leurs chiennes et leurs juments par les plus beaux chiens et les meilleurs estalons qu'ilz pouvoient recouvrer, Amyot, ib. 30. Ilz se cachoient durant le jour en quelques lieux couverts, là où ilz se reposoient, Amyot, ib. 58. L'on dit que les perdrix s'engressent à couvrir leurs femelles, Amyot, Solon, 38. Je couvray tous les lopins desdits pots desdites drogues couchées avec le pinceau, Palissy, 319. Monsieur, cependant qu'on couvrira pour vous donner un mauvais soupper, voulez-vous faire un tour d'allée ? D'Aubigné, Faen. I, 5. Il valoit mieux confesser une faute en grammaire, que de la couvrir par des blasphemes, D'Aubigné, ib. II, 1. Un gentil-homme bien couvert s'arresta devant la boutique d'un orphevre, D'Aubigné, ib. IV, 7. Un cabinet de livres couverts bien proprement, D'Aubigné, Vie, V. D'Aubigné s'estoit jetté au devant de lui pour le couvrir de son corps et empecher qu'il ne lui mesavint, D'Aubigné, ib. XLII. Cosseins arresta ceux qui estoient sortis, avec nombre de noblesse et gens couverts, D'Aubigné, Hist. II, 46. L'air nebuleux, couvert et humide, Paré, VI, 23. Voire s'en treuve [des vins] de si tardifs, que jamais ne peuvent venir rouges ne couvers [chargés, colorés], quoiqu'on les tienne un mois dans la cuve, De Serres, 215. Ô que mal-aisement l'ambition se couvre ! Ronsard, 975. Le feu plus couvert est le plus ardent, Cotgrave Retournerent en la salle où l'on commençoit desjà à couvrir [à servir], et se mirent à table, Nuits de Straparole, t. II, p. 14, dans LACURNE. Couvrir la joue [souffleter], Oudin, Dict.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

COUVRIR. Ajoutez :
18Semer. Quel grain veux-tu répandre dans ces lieux ? Le manant dit : Monseigneur, pour le mieux, Je crois qu'il faut les couvrir de touselle, Car c'est un grain qui vient fort aisément, La Fontaine, Papefig.
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Encyclopédie, 1re édition (1751)

COUVRIR, (Jurisprud.) signifie parer, garantir, sauver, opposer quelqu’exception ou défense.

Couvrir un fief ou arriere-fief, c’est prévenir & empêcher la saisie féodale d’un fief qui est ouvert, en faisant la foi & hommage ou offrant de la faire, & de payer les droits si aucuns sont dûs.

Couvrir une fin de non-recevoir, c’est la parer, l’écarter de maniere qu’elle ne peut plus être opposée. La fin de non-recevoir que l’on pouvoit opposer au demandeur est couverte, lorsque le défendeur a procédé volontairement au fond sans opposer la fin de non-recevoir, & sans qu’elle ait été reservée par aucun jugement : c’est pourquoi l’ordonnance de 1667, tit. v. art. 5. veut que l’on employe dans les défenses les fins de non-recevoir, nullité des exploits, ou autres exceptions péremptoires, si aucunes y a, pour y être préalablement fait droit.

Couvrir une nullité, c’est l’écarter par une espece de fin de non-recevoir ; ce qui arrive lorsque celui qui pouvoit débattre de nullité un exploit, jugement, ou acte, a approuvé cet acte, & a procédé volontairement en conséquence. Voyez ce qui est dit dans l’article précédent.

Couvrir la péremption, c’est la prévenir de maniere qu’elle ne puisse plus être opposée. Lorsqu’il y a eu cessation de procédures pendant trois ans, celui qui a intérét de faire anéantir ces procédures, peut en demander la péremption : mais si avant qu’elle soit demandée il se fait de part ou d’autre la moindre procédure, quoique ce soit depuis les trois ans, la péremption est couverte. Voyez Péremption.

Couvrir la prescription ; c’est lorsque par quelqu’acte de possession ou par quelque procédure, on interrompt la prescription qui commençoit à courir. (A)

Couvrir, en terme de Cirier, c’est mettre la derniere couche aux bougies, en les attachant par la tête au cerceau. Voyez Cerceau & Tête.

Couvrir, (Jardin.) On dit couvrir de fumier sec un quarré d’artichaux, pour les préserver de la gelée ; couvrir avec de la litiere des figuiers, des jasmins, des grenadiers, une planche de salade nouvellement semée, une de chicorée. On couvre avec des paillassons ou une toile, des plantes nouvellement levées sur la couche, pour leur ôter le trop grand soleil. (K)

Couvrir une aiguille, terme à l’usage de ceux qui font les filets pour la pêche & la chasse : leur aiguille est ordinairement de bois ; & la couvrir, c’est mettre du fil dessus.

Couvrir ou Saillir, (Manége.) se dit des jumens auxquelles on donne l’étalon. C’est une mauvaise coûtume de faire couvrir les cavales en main, c’est-à dire en les tenant par le licou ou par la bride, il vaut mieux les laisser dans leur liberté naturelle, le poulain en est beaucoup mieux formé. (V)

Couvrir, (Reliure.) Quand les couvertures sont parées, on les trempe à la colle, & ensuite on prend le livre prêt à couvrir, on égalise les bords du carton de chaque côté du volume, ce qui s’appelle égaliser les chasses. Ensuite on applique le carton qui est renversé sur la table ; & quand la colle a attaché la couverture au carton, on met le livre sur son champ, & en passant le plat de la main dans toute l’étendue, & ensuite le plioir, on tire bien le cuir sur les bords, pour qu’il soit exactement tendu de toute part sans faire aucun pli. Quand cela est entierement fait, on renverse tout-à-l’entour du carton les extrémités de la couverture en-dedans du carton, & on pince exactement les bouts de la peau aux angles, que l’on coupe, afin qu’en dedans on puisse croiser ce qui en reste sans faire une élevation desagréable ; ensuite on coëffe les tranchefils. Voyez Coeffer, Tremper à la colle les couvertures.

La même façon se pratique pour toutes sortes de couvertures.

Couvrir, en terme de Raffineur de sucre ; c’est mettre sur la pâte du pain une couche de terre délayée en bouillie, pour entraîner le syrop avec l’eau qui soit de cette terre, & filtre à-travers le pain.

Couvrir, au trictrac ; c’est placer une dame sur une autre qui étoit découverte ou seule. Voyez Trictrac.

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Étymologie de « couvrir »

Berry, covrir ; bourgnig. côvre ; picard, coeuvrir ; saintong. chuvrir ; wallon, covrî ; rouchi, couver ; provenç. cobrir, cubrir ; espagn. cubrir ; ital. coprire ; du latin cooperire, de co, pour cum, et operire, couvrir.

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Du latin cooperire (« couvrir totalement, accabler »). La racine latine est composée de co- (préfixe augmentatif) et operire (« couvrir, voiler »).
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Phonétique du mot « couvrir »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
couvrir kuvrir

Évolution historique de l’usage du mot « couvrir »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « couvrir »

  • Le bonheur ou le malheur, à partir du moment où l’on possède de quoi se nourrir, se couvrir, se loger, on les porte en soi. De Henri Laborit / Copernic n’y a pas changé grand-chose , 
  • Celui qui s’est engagé à tisser un coutil pour couvrir les fesses de l’éléphant s’est obligé à réussir une oeuvre exceptionnelle. De Ahmadou Kourouma / Monnè, outrages et défis , 
  • La parole n'est pas faite pour couvrir la vérité, mais pour la dire. De José Marti , 
  • Le manteau de la liberté sert à couvrir nombre de petites chaînes. De Président de Brosses / Lettres , 
  • La tentation sent le besoin de se couvrir des apparences du devoir. De Lionel Groulx / L'Appel de la race , 
  • Le caprice est une couverture qui ne peut couvrir tous les lits. De Jack Vance / Le Visage du démon , 
  • Il n’est pas de manteau assez grand pour couvrir à la fois la pauvreté et l’ivrognerie. De Proverbe magyar , 
  • Une robe de femme, doit être comme une plaidoirie : assez longue pour couvrir le sujet, assez courte pour être suivie. De Anonyme , 
  • Ecoutez ce silence, quel grand fracas il porte en lui ; et rien ne sert de se couvrir les oreilles. De Dario Fo / Passione , 
  • On est bien que libre, et cacher ses opinions est encore plus gênant que de couvrir sa peau. De Marguerite Yourcenar / L'Œuvre au noir, 1968 , 
  • Mozart adorait la voix humaine, il était très attentif à ne jamais la couvrir avec les instruments de l’orchestre. De Cecilia Bartoli , 
  • Quand l'amour a su dire enfin son propre nom, les lèvres n'ont plus qu'à sourire et se taire, et couvrir de baisers. De Denys Gagnon / Chants et silences des trois créatures , 
  • Un discours à la fin d'un repas doit être comme la robe d'une jolie femme. Assez long pour couvrir l'essentiel. Assez court pour rester intéressant. De Ralph Waldo Emerson , 
  • Quand un gouvernement en est venu à traiter la chose publique comme la sienne propre et que sa ruse et ses violences ne servent plus à couvrir ses méfaits, il est temps qu'il soit renversé. De J.M. - Alfred Mousseau / Les Vermoulures , 
  • Regarder le monde, ce n’est pas juste s’asseoir sur un banc et le couvrir des yeux ; c’est aussi y pénétrer, s’y promener, en faire le tour. De Chris Ware / Evene.fr - Mars 2009 , 
  • Le bonheur ou le malheur, à partir du moment où l’on possède de quoi se nourrir, se couvrir, se loger, on les porte en soi. De Henri Laborit / Copernic n’y a pas changé grand-chose , 
  • Celui qui s’est engagé à tisser un coutil pour couvrir les fesses de l’éléphant s’est obligé à réussir une oeuvre exceptionnelle. De Ahmadou Kourouma / Monnè, outrages et défis , 
  • La parole n'est pas faite pour couvrir la vérité, mais pour la dire. De José Marti , 
  • Le manteau de la liberté sert à couvrir nombre de petites chaînes. De Président de Brosses / Lettres , 
  • La tentation sent le besoin de se couvrir des apparences du devoir. De Lionel Groulx / L'Appel de la race , 

Images d'illustration du mot « couvrir »

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Traductions du mot « couvrir »

Langue Traduction
Anglais cover
Espagnol cubrir
Italien copertina
Allemand startseite
Chinois
Arabe التغطية
Portugais cobrir
Russe обложка
Japonais カバー
Basque azal
Corse copre
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Synonymes de « couvrir »

Source : synonymes de couvrir sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « couvrir »

Combien de points fait le mot couvrir au Scrabble ?

Nombre de points du mot couvrir au scrabble : 12 points

Couvrir

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