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Participe passé d’un verbe pronominal : quand et comment l’accorder ?

Les verbes pronominaux (comme s’évanouir et s’apercevoir) ou constructions pronominales (comme se laver et se battre) se conjuguent toujours avec l’auxiliaire être aux temps composés. À cause de l’auxiliaire être, on est tenté d’accorder le participe passé du verbe en genre et en nombre avec le sujet. Pourtant il existe des cas où, malgré l’auxiliaire être, le participe passé ne s’accorde pas… Comment savoir, alors ? On vous explique tout dans cet article.

Comment accorder le participe passé des verbes pronominaux

Pour décider si le participe passé d’un verbe pronominal s’accorde en genre et en nombre aux temps composés il faut se concentrer sur le pronom personnel conjoint coréférentiel « se ». C’est la fonction de « se » dans la phrase qui aide à prendre une décision : soit on ne peut pas lui donner de fonction (on dit alors qu’il est inanalysable) (Règle 1) ; soit on peut donner une fonction à ce pronom, celle de complément d’objet direct (COD) ou de complément d’objet indirect (COI) (Règle 2).

Règle 1 : si le pronom personnel conjoint coréférentiel « se » n’a pas de fonction, alors il faut accorder le participe passé. Exemple : Elle s’est démenée pour rien. Dans cet exemple, « se » n’a pas de fonction car il n’est ni un COD ni un COI : on ne peut pas dire « elle a démené elle-même » ou « elle a démené à elle-même ».


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Quatre constructions pronominales, dans lesquelles le pronom « se » est inanalysable, font exception. Il s’agit de se rire, se plaire, se déplaire et se complaire. Pour ces quatre constructions, le participe passé ne s’accorde pas (Par exemple : « Ils se sont déplu dans cette auberge » ; « Elles se sont ri de moi »).

Règle 2 : il existe deux cas lorsque « se » a une fonction :

  • Soit il est COD et il faut accorder comme dans les exemples : Elle s’est coiffée ou Ils se sont connus très jeunes. Dans ces exemples, « se » est COD car il est question de dire « elle a coiffé elle-même », « chacun a connu l’autre très jeune », et les verbes « coiffer » et « connaître » se construisent normalement sans préposition (coiffer quelqu’un/quelque chose et connaître quelqu’un/quelque chose). Or, en l’absence de préposition, la complémentation est directe (COD).
  • Soit il est COI et il ne faut pas accorder comme dans l’exemple : Ils se sont parlé ce matin. Dans ce cas, « se » est COI car il est question de dire « chacun a parlé à l’autre ce matin » et le verbe « parler » se construit toujours avec la préposition à. La préposition entre « parler » et « l’autre » rend la complémentation indirecte (COI).

Le cas du verbe « se dire » : écrit-on « ils se sont dit » ou « ils se sont dits » ?

Pour illustrer la règle de l’accord du participe passé d’un verbe pronominal, prenons le cas du verbe « se dire » avec deux exemples. 

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Exemple 1 : La présidente s’est dite ouverte à la discussion sur ce sujet. Le verbe « se dire » est ici synonyme de « se déclarer », où « se » est COD (déclarer soi-même), donc on accorde le participe passé du verbe « dire ».

Les uns, en voyant le jour, ont été exposés aux bêtes féroces ; les autres sont nés de parents d'une si vile extraction, que, rougissant de leur origine, ils se sont dits fils de Jupiter ou de quelque autre dieu.

Machiavel, Vie de Castruccio Castracani de Lucques

Exemple 2 : La présidente s’est dit qu’il valait mieux reporter la réunion, on n’accorde pas le participe passé de « dire ». Dans cet exemple, le verbe « dire » reçoit comme COI « se » (la Présidente se dit à elle-même) et comme COD la subordonnée complétive conjonctive « qu’il valait mieux reporter la réunion ». Puisque « se » est COI, on n’accorde pas « se dire ».

Mais la tunique était sans couture, tissée tout d'une pièce depuis le haut. Ils se sont dit les uns aux autres Ne la déchirons pas, mais tirons au sort à qui elle sera.

L'Évangile selon Jean

Dans le cas du pluriel, on écrira Ils se sont dits favorables à cette nouvelle mesure (comme on dirait Ils se sont déclarés favorables à cette nouvelle mesure) et Ils se sont dit oui.

Une hésitation que l’on entend parfois concerne les phrases à la première personne du singulier et accord au féminin. La règle présentée ici montre que les locutrices doivent dire Je me suis dit que cela serait une bonne idée ou Je me suis dit la même chose puisque « se » n’est pas COD – la fonction de COD étant remplie par la conjonctive « que cela serait une bonne idée » et par le groupe nominal « la même chose ».

Il ne faut donc pas dire Je me suis dite que j’avais tort.

Pour aller plus loin : les locutions à verbe support (« avoir peur », « avoir faim ») présentant le pronom coréférentiel « se » comme « se faire mal », « se faire un sang d’encre » ou « se faire violence » sont des constructions verbales particulières dans lesquelles on ne peut séparer le verbe du complément qui le suit, excepté par un adverbe (je me suis fait très mal). Cette solidarité forte est aussi appelée coalescence : il y a comme une soudure qui empêche d’accorder le participe passé du verbe. On dira donc Elles se sont fait mal, Ils se sont fait violence pour relever ce défi.

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Clarisse Chabernaud

Clarisse Chabernaud est docteure en langue et littérature françaises, spécialiste de l'histoire du nom propre et des tragédies de Jean Racine.

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