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Hypotaxe - Figure de style [définition et exemples]

Définition de l'hypotaxe

L'hypotaxe est une figure de style qui consiste à utiliser abondamment des liens de subordination ou de coordination dans une phrase complexe, où les propositions se succèdent. Les mots de liaisons ou locutions comme et, ou, mais, car, parce que, de plus… précisent la logique et apportent du sens entre les propositions qui s’enchaînent. 

Exemple d'hypotaxe :

Il rajusta son col et son gilet de velours noir sur lequel se croisait plusieurs fois une de ces grosses chaînes d'or fabriquées à Gênes ; puis, après avoir jeté par un seul mouvement sur son épaule gauche son manteau doublé de velours en le drapant avec élégance, il reprit sa promenade sans se laisser distraire par les œillades bourgeoises qu'il recevait.

Honoré de Balzac, Gambara

Différence entre l'hypotaxe et la parataxe

Cette figure de style s’oppose à la parataxe, où le rapport logique et sémantique est implicite. Effectivement, contrairement à l’hypotaxe, la phrase au style parataxique se construit sans avoir recours à l’utilisation de conjonctions de subordination ou de coordination, ou encore de prépositions. 


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Plus utilisée dans un discours oral, le style parataxique s’oppose à l’écrit hypotaxique.

Selon Martin Riegel, dans son ouvrage sur la Grammaire méthodique du français : « si l'on approche néanmoins à juste titre la juxtaposition et la coordination pour les opposer à la subordination, c'est qu'indépendamment de la présence ou de l'absence d'un terme de liaison, les deux premières opèrent sur le mode de l'enchaînement parataxique (qui joue également entre des mots et des syntagmes), alors que la troisième opère par emboîtement hypotaxique de propositions (à l'exclusion de tout autre constituant) ». 

En savoir plus sur la parataxe >

Très employée dans les écrits littéraires, particulièrement pour les argumentations, descriptions de personnages ou de situations, l’hypotaxe produit un effet harmonieux entre les idées, parfaitement ordonnées. En revanche, la parataxe rend la phrase ou le discours dynamique en exprimant des actions rapides, enchaînées, voire saccadées. L'hypotaxe, elle, permet une hiérarchisation des informations et une progression thématique

L'hyperhypotaxe

L'hyperhypotaxe est une hypotaxe particulière. Précédée du préfixe « hyper » signifiant « beaucoup », l’hyperhypotaxe consiste à exagérer l’emploi des mots de liaison dans une même phrase. 

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Ainsi, les propositions subordonnées ou coordonnées, trop nombreuses, peuvent alourdir le rythme du texte, obscurcir le discours, et donner un effet de confusion parmi les propos énoncés, surtout si la technique n’est pas maîtrisée. 

Lorsque la confusion est telle que la phrase est incompréhensible, on parle alors de synchyse. Raymond Queneau en a même fait une démonstration dans son célèbre ouvrage « Exercices de style », où il enchaîne neuf subordonnées dans une des versions de l’histoire, intitulée « Synchises » :

Le jeune homme que je vois en train de causer devant la gare Saint-Lazare avec un camarade qui semble lui suggérer de faire ajouter un bouton à l'échancrure de son pardessus, et en qui je crois reconnaître le passager au long cou que je remarquai, il y a deux heures, dans l'autobus «S» parce que juste avant que ne se libère une place et qu'il ne s'y précipite, il avait attiré mon attention à cause du ton pleurnichard qu'il empruntait pour reprocher à son voisin de le bousculer chaque fois que quelqu'un descendait du véhicule, portait-il vraiment déjà à l'arrêt cet étonnant chapeau entouré d'une cordelette tressée ?

Raymond Queneau, Exercices de style

Voici un autre exemple d'hyperhypotaxe :

Vous me reprochez si flatteusement mon mauvais caractère, que ce n'est pas un trop bon moyen de m'en corriger ; car, puisqu'en écrivant mal je vous oblige enfin de m'en reprendre plus doucement qu'à me dire que j'écris bien, je ne sais si je ne ferais pas mieux de continuer de faillir que de m'amender...

Mademoiselle de Scudéry, Lettres de Mademoiselle de Scudéry à M. Godeau, évêque de Vence

Selon André Thérive, « l’hyperhypotaxe est une période destinée, non plus à être prononcée, mais à être lue. Son développement épouse la diversité et la multiplicité des rapports perceptibles lors d’une lecture, alors que la période classique correspond au rythme du style soutenu oral ».

Origine et étymologie de l'hypotaxe

Le terme hypotaxe provient du grec ὐπόταξις, hypotáxis qui signifie « subordination ». Dérivé du mot grec « ὑποτάττω, hypotáttō » signifiant « ranger, ordonner sous », le terme est apparu au XIXe siècle.

En savoir plus sur la définition du mot hypotaxe >

Exemples d'hypotaxes

Un matin de décembre vers la fin de l'année, alors que la neige tombait humide et lourde sur des kilomètres tout autour de sorte que la terre et le ciel étaient indivisibles, Mme Bridge est sortie de chez elle et a déployé son parapluie.

Evan S. Connell, Mme Bridge

Que le lecteur soit présenté à Joan Didion, dont le caractère et les actions dépendront beaucoup de l'intérêt que ces pages peuvent avoir, alors qu'elle est assise à son bureau dans sa propre chambre dans sa propre maison de la rue Welbeck.

Joan Didion, Démocratie

Entre la couleur grise et douce d’une campagne matinale et le goût d’une tasse de chocolat, je faisais tenir toute l’originalité de la vie physique, intellectuelle et morale que j’avais apportée, environ une année auparavant, à Doncières, et qui, blasonnée de la forme oblongue d’une colline pelée – toujours présente même quand elle était invisible – formait en moi une série de plaisirs entièrement distincte de tous autres, indicibles à des amis en ce sens que les impressions tissées les unes dans les autres qui les orchestraient, les caractérisaient bien plus pour moi et à mon insu que les faits que j’aurais pu raconter.

Marcel Proust, Le côté de Guermantes

Dans le cas particulier, l’article du code à cause duquel il était peu probable que sauf le cas d’incendie Françoise allât déranger maman en présence de M. Swann pour un aussi petit personnage que moi, exprimait simplement le respect qu’elle professait non seulement pour les parents – comme pour les morts, les prêtres et les rois – mais encore pour l’étranger à qui on donne l’hospitalité, respect qui m’aurait peut-être touché dans un livre mais qui m’irritait toujours dans sa bouche, à cause du ton grave et attendri qu’elle prenait pour en parler, et davantage ce soir où le caractère sacré qu’elle conférait au dîner avait pour effet qu’elle refuserait d’en troubler la cérémonie.

Marcel Proust, Du côté de chez Swann

Pour en savoir plus, consultez notre guide des figures de style.

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Sujets :  figure de style

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