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La poésie

Qu’est qu’une poésie ?

La poésie est un genre littéraire dont la façon d’écrire repose sur des sonorités, un rythme et des images, déclenchant chez le lecteur ou l’auditeur une certaine émotion. En maniant l’art du langage, le poète raconte, décrit et exprime ses sentiments à travers des textes poétiques qui exploitent toutes les ressources de la langue.

Le pouvoir évocateur des mots choisis, la musicalité, l’harmonie, ainsi que la forme du poème, permettent de toucher les lecteurs par la beauté du texte. 

La poésie est un genre littéraire qui doit respecter des contraintes formelles et des règles techniques appelées versification, avec lesquelles le poète crée des effets liés au sens du texte. 


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En utilisant des techniques de versification, la poésie se distingue de la prose. Cependant, certains textes en prose emploient des procédés poétiques, comme dans ce court poème en prose extrait du Spleen de Paris.

Un homme épouvantable entre et se regarde dans la glace.
« - Pourquoi vous regardez-vous au miroir, puisque vous ne pouvez vous y voir qu'avec déplaisir ? » L'homme épouvantable me répond : « Monsieur, d'après les immortels principes de 89, tous les hommes sont égaux en droits ; donc je possède le droit de me mirer ; avec plaisir ou déplaisir, cela ne regarde que ma conscience. »
Au nom du bon sens, j'avais sans doute raison ; mais, au point de vue de la loi, il n'avait pas tort. 

Charles Baudelaire, Le miroir

À la différence d’un texte classique, la prose a tout de même une dimension poétique caractérisée par le rythme des mots, les sonorités, les figures de style et autres procédés appartenant au genre poétique.

Selon sa fonction, la poésie permet également de raconter des histoires, célébrer des personnes ou des évènements, exprimer un engagement.

Aujourd’hui, nombreux sont les poèmes étudiés en classe, quel que soit le niveau. Réciter un poème avec la bonne intonation est un exercice scolaire qui se pratique dès le second cycle de l’école élémentaire. 

Étymologie de la poésie

Apparu au XVe siècle, le mot poésie provient du verbe grec poien signifiant « faire, créer, produire » qui a donné le nom grec poiêsis qui désigne la composition d’œuvres poétiques et donc le genre poétique. Des termes dérivés tels que poétereau, poétesse, poétiser ont fait leur apparition par la suite. 

Il est important de faire un petit rappel de vocabulaire. Les termes poésie et poème, qui sont étymologiquement proches, sont souvent confondus alors qu’ils n’ont pas le même sens. Le terme poème désigne tout particulièrement le texte écrit (un recueil de poèmes) tandis que la poésie est le genre littéraire que nous évoquons dans cet article.

Histoire de la poésie

La poésie existe depuis l’Antiquité, au travers des chants et du théâtre. Au Moyen-Âge, les troubadours interprétaient cet art par le biais de leurs poèmes, accompagnés de mélodies, sur les places publiques.

Au travers des siècles, plusieurs genres poétiques permettent aux poètes de s’exprimer sur des tons variés dans leurs créations littéraires :

  • la poésie épique, ou épopée, qui chante les exploits de personnages historiques ou mythologiques, sous la forme d’un long poème narratif. Citons quelques exemples : au VIIIe siècle avant J.-C., L’Illiade et l’Odyssée célèbre de nombreux guerriers grecs dont le héros légendaire Achille, pendant la guerre de Troie. La Chanson de Roland, poème épique du XIe siècle symbolise les chansons de geste qui mettent en scène les chevaliers du Moyen-Âge devenus des personnages de légende. 

Rollant reguardet Oliver al visage :
Teint fut e pers, desculuret e pale.
Li sancs tuz clers par mi le cors li raiet,
Encuntre tere en cheent les esclaces.
« Deus ! » dist li quens, « or ne sai jo que face.
Sire cumpainz, mar fut vostre barnage !
Jamais n’iert hume ki tun cors cuntrevaillet.
E ! France dulce, cun hoi remendras guaste
De bons vassals, cunfundue e chaiete !
Li emperere en avrat grant damage.

Traduction : 

Roland regarde Olivier au visage : il le voit terni, blêmi, tout pâle, décoloré. Son sang coule clair au long de son corps ; sur la terre tombent les caillots. « Dieu ! » dit le comte, « je ne sais plus quoi faire. Sire compagnon, c’est grand’pitié de votre vaillance ! Jamais nul ne te vaudra. Ah ! France douce, comme tu resteras aujourd’hui dépeuplée de bons vassaux, humiliée et déchue ! L’empereur en aura grand dommage.

La Chanson de Roland, Laisse CXLVIII
  • La poésie lyrique, apparue au Moyen-Âge, est une forme plus intime du genre. À travers les vers, le poète partage avec le lecteur les sentiments et les émotions qu’il ressent, dans un objectif de libération de sa part. Initialement accompagné de musique (la lyre), l’amour est le thème principal abordé en poésie lyrique. La douleur ressentie par Louise Labé tout au long de son poème « Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie », dans lequel elle se lamente sur son chagrin d’amour, est exprimée de façon lyrique.

Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie ;
J’ai chaud extrême en endurant froidure :
La vie m’est et trop molle et trop dure.
J’ai grands ennuis entremêlés de joie.

Tout à un coup je ris et je larmoie,
Et en plaisir maint grief tourment j’endure ;
Mon bien s’en va, et à jamais il dure ;
Tout en un coup je sèche et je verdoie.

Ainsi Amour inconstamment me mène ;
Et, quand je pense avoir plus de douleur,
Sans y penser je me trouve hors de peine.

Puis, quand je crois ma joie être certaine,
Et être au haut de mon désiré heur,
Il me remet en mon premier malheur.

Louise Labé, Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie.
  • La poésie engagée : au fil des siècles, de nombreux poètes ont utilisé la force de la poésie pour exprimer leurs idées et leurs engagements, que ce soit dans un contexte social, politique, philosophique, religieux ou culturel. En rédigeant des textes engagés, ils invitent les lecteurs à adhérer à la cause qu’ils défendent. Nous pouvons citer Théodore Agrippa d’Aubigné, un poète engagé qui a composé le long poème des Tragiques au XVIIe siècle, dans lequel il dénonce les horribles massacres de la Saint-Barthélemy. En voici un extrait :

Je veux peindre la France une mère affligée, 
Qui est, entre ses bras, de deux enfants chargée. 
Le plus fort, orgueilleux, empoigne les deux bouts 
Des tétins nourriciers ; puis, à force de coups 
D'ongles, de poings, de pieds, il brise le partage 
Dont nature donnait à son besson l'usage ; 
Ce voleur acharné, cet Esaü malheureux, 
Fait dégât du doux lait qui doit nourrir les deux, 
Si que, pour arracher à son frère la vie,

Il méprise la sienne et n'en a plus d'envie.
[…] Ni les soupirs ardents, les pitoyables cris
Ni les soupirs ardents, les pitoyables cris,
Ni les pleurs réchauffés ne calment leurs esprits ;
Mais leur rage les guide et leur poison les trouble,
Si bien que leur courroux par leurs coups se redouble.
Leur conflit se rallume et fait si furieux
Que d'un gauche malheur ils se crèvent les yeux.
Cette femme éplorée, en sa douleur plus forte ,
Succombe à la douleur, mi-vivante, mi-morte ;

Théodore Agrippa d’Aubigné, Je veux peindra la France (Les Tragiques)

Les caractéristiques de la poésie

Quelle que soit la fonction de la poésie, le genre poétique est celui qui a le plus de contraintes, dans sa forme fixe. La poésie est connue depuis l’Antiquité grecque, chaque auteur se soumettant aux règles qui concernent l’organisation et la mesure des vers, les rimes et les sonorités du poème.

Au début du XIXe siècle apparaît la forme libre de la poésie qui constitue un important virage dans la création poétique. Les poètes explorent de nouvelles créations formelles, sans exigence particulière. 

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Découvrons ensemble le lexique et la présentation spécifiques qui caractérisent ces deux formes de poésie. 

L’organisation des vers et des strophes dans la poésie

Dans sa forme fixe, le poème se reconnaît à l’organisation de ses vers, chaque vers étant une ligne unique qui se mesure selon certaines règles. Le vers commence toujours par une majuscule et présente un nombre de syllabes déterminé :

  • un alexandrin pour un vers de douze syllabes ;
  • un décasyllabe pour un vers de dix syllabes ;
  • un octosyllabe pour un vers de huit syllabes
  • un hexasyllabe pour un vers de six syllabes.

Ces quatre mesures sont les plus employées, chacune produisant des effets différents adaptés à un ton poétique particulier. Par exemple, l’alexandrin, très long, est souvent employé régulièrement en poésie mais aussi au théâtre dans les tragédies classiques.

Nous partîmes cinq cents ; mais par un prompt renfort
Nous nous vîmes trois mille en arrivant au port

Corneille, Le Cid

L’ensemble de ces vers forment un groupe appelé strophe, produisant ainsi une harmonie au sein du poème. Les strophes respectent un ordre préétabli et sont donc plus ou moins régulières.

Concernant la régularité des vers et des strophes, les poèmes à forme fixe respectent des règles spécifiques, différentes selon la forme. Sonnet, ballade, rondeau, acrostiche, pantoum et chanson avec un refrain, font partie des formes poétiques qui nécessitent le plus de rigueur. 

Quant aux vers libres, ils ne respectent aucune structure spécifique : ils sont de longueur variable et ne sont pas regroupés en strophes. 

Mes mains brûlantes glissent sur les murs glacés
J’ai peu d’espoir de mémoire
Déjà j’ai tout perdu
Je n’ai plus ces maisons de roses pénétrées
Ni les rues ces rameaux de l’arbre le plus vert
Mais les derniers échos de l’aube maternelle
Ont adouci mes jours.

Paul Éluard, Mes mains brûlantes

Les rimes dans la poésie

La musicalité d’un poème dépend beaucoup des rimes, sonorités que l’on trouve souvent à la fin des vers, qui concernent uniquement la poésie en vers fixes. Grâce aux rimes, les textes sont plus facilement mémorisables, et l’effet du poème s’en trouve renforcé.

Ces rimes sont qualifiées de pauvres, suffisantes ou riches selon le nombre de sonorités répétées. Leur disposition joue également un rôle dans l’écriture du poème : rimes plates, suivies, croisées ou alternées, embrassées, continues, concaténées, redoublées, brisées … autant de qualificatifs pour désigner la place de la rime, influant énormément sur la sonorité et le rythme du poème.

Sonorités et figures de style dans la poésie

Pour éveiller la sensibilité des lecteurs et donner du sens au texte, le poète emploie des figures de style qui jouent sur les sonorités, comme des allitérations et des assonances. Par exemple, le vers de Paul Verlaine « Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant », produit un effet d’insistance avec la répétition du son « an ».

Des images mentales sont évoquées dans l’esprit du lecteur grâce à des figures d’analogie, telles que des allégories, comparaisons, métaphores ou personnifications.  Le célèbre poème populaire « Mignonne allons voir si la rose », dans lequel Pierre de Ronsard fait une ode à Cassandre Salviati, la femme aimée, en comparant sa beauté à la beauté de la nature et particulièrement, de la rose. 

Mignonne, allons voir si la rose
Qui ce matin avoit desclose
Sa robe de pourpre au Soleil,
A point perdu ceste vesprée
Les plis de sa robe pourprée,
Et son teint au vostre pareil.
Las ! voyez comme en peu d’espace,
Mignonne, elle a dessus la place
Las ! las ses beautez laissé cheoir !
Ô vrayment marastre Nature,
Puis qu’une telle fleur ne dure
Que du matin jusques au soir !
Donc, si vous me croyez, mignonne,
Tandis que vostre âge fleuronne
En sa plus verte nouveauté,
Cueillez, cueillez vostre jeunesse
Comme à ceste fleur la vieillesse
Fera ternir vostre beauté.

Pierre de Ronsard, Mignonne allons voir si la rose

Exemples de poèmes

Une petite sélection de poèmes issus de différents recueils écrits au travers des siècles. 

Un poème écrit par Victor Hugo au XIXe siècle, en forme de quatrains de vers de quatre syllabes, extrait du recueil Les chansons des rues et des bois. Le poète exprime, dans un ton lyrique, ses sentiments et ses émotions.

À la belle impérieuse

L'amour, panique
De la raison,
Se communique
Par le frisson.

Laissez-moi dire,
N'accordez rien.
Si je soupire,
Chantez, c'est bien.

Si je demeure,
Triste, à vos pieds,
Et si je pleure,
C'est bien, riez.

Un homme semble
Souvent trompeur.
Mais si je tremble,
Belle, ayez peur.

Victor Hugo, À la belle impérieuse

Un poème mélancolique sous forme de sonnet, dans lequel le poète Gérard de Nerval évoque le deuil d’une femme dont il était amoureux. Quatre strophes constituent ce poème : deux quatrains avec des rimes croisées et deux tercets.

Je suis le Ténébreux, – le Veuf, – l’Inconsolé,
Le Prince d’Aquitaine à la Tour abolie :
Ma seule Etoile est morte, – et mon luth constellé
Porte le Soleil noir de la Mélancolie.

Dans la nuit du Tombeau, Toi qui m’as consolé,
Rends-moi le Pausilippe et la mer d’Italie,
La fleur qui plaisait tant à mon coeur désolé,
Et la treille où le Pampre à la Rose s’allie.

Suis-je Amour ou Phébus  … Lusignan ou Biron ?
Mon front est rouge encor du baiser de la Reine ;
J’ai rêvé dans la Grotte où nage la sirène…

Et j’ai deux fois vainqueur traversé l’Achéron :
Modulant tour à tour sur la lyre d’Orphée
Les soupirs de la Sainte et les cris de la Fée.

El Desdichado, Gérard de Nerval

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Natacha Lovato

Natacha Lovato rédige pour La langue française des articles autour de la linguistique, la littérature et les expressions. Passionnée par la langue française, elle s'est aujourd'hui spécialisée dans la communication écrite afin de transmettre ses connaissances. Elle est aussi gérante d'un organisme de formation dédié à la communication écrite, et accompagne les adultes pour des remises à niveaux en français afin de perfectionner leurs écrits professionnels.

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Sujets :  genre littéraire

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