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Faut pas pousser mémé dans les orties : définition et origine de l'expression

De manière générale, les principes les plus basiques de bienséance recommandent fortement d’éviter de se frotter à un champ d’orties — et a fortiori de s’abstenir d’y pousser qui que ce soit, qu’il s’agisse d’une personne âgée, d’un adulte ou d’un jeune bambin. 

Aux moins téméraires de nos lecteurs, qui auraient eu la chance de traverser jusqu’ici la vie sans jamais chuter malencontreusement dans les orties, précisons en effet que cette mauvaise herbe provoque de sévères irritations et l’apparition de plaques rouges sur la peau, lesquelles sont particulièrement désagréables quoiqu’a priori bénignes pour la santé.

Ce principe étant établi, il semble donc assez superflu de rappeler qu’il ne « faut pas pousser mémé dans les orties » — pourquoi donc cette dernière aurait-elle besoin d’une précaution plus spécifique ? Mémé serait-elle plus sensible aux orties que l’ensemble des êtres humains ? Des statistiques ont-elles révélé une plus grande proportion de personnes jetées dans les orties chez les grands-mères que dans les autres catégories de population ?


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Pour élucider ce mystère, nous vous invitons à lire cet article sur l’usage, la définition et l’origine de l’expression « faut pas pousser mémé dans les orties »

Définition de l’expression « faut pas pousser mémé dans les orties »

Par l’emploi d’une image particulièrement visuelle, l’expression « faut pas pousser mémé dans les orties » signifie qu’il ne faut pas exagérer, qu’il ne faut pas dépasser les limites (on utilisera aussi la formule « ne pas dépasser les bornes », pour convoquer une idée similaire).

Par extension, cette expression veut également dire qu’il faut se comporter d’une manière adéquate, et ne pas abuser de quelqu’un ou de quelque chose, ou adopter une attitude inappropriée, impolie ou malvenue

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On pourra donc recourir à cette image dans tout contexte où les limites habituelles de la bienséance et du vivre-ensemble sont susceptibles d’être franchies, et où les règles élémentaires de politesse et d’amabilité risquent d’être transgressées.

Origine de l’expression « faut pas pousser mémé dans les orties »

Difficile d’identifier l’origine exacte de cette expression, vraisemblablement apparue au XXe siècle, par déformation de la formule initiale « faut pas pousser », qui signifiait déjà « faut pas exagérer », et que l’on a aussi pu voir évoluer vers une autre image équivalente, « faut pas pousser le bouchon trop loin ».

La « mémé », dans cette expression, peut aussi bien faire référence au terme affectueux qui veut dire « grand-mère » (au même titre que « mamie », « mémère » ou « mamy »), qu’au terme plus péjoratif qui désigne, par capillarité, l’ensemble des personnes âgées. Elle est en tout cas l’allégorie d’une personne innocente, qui ne mérite en aucun cas qu’on la malmène — à l’instar des règles élémentaires de savoir-vivre que l’on évoque au sens figuré lorsqu’on emploie cette expression.

On suppose que cette image a rapidement connu le succès et s’est répandue dans le langage courant du fait de sa dimension universelle : tout le monde imagine sans peine le caractère inapproprié et malveillant derrière le geste de pousser sciemment une dame âgée dans un champ d’orties.  

Pour les âmes sensibles, l’expression équivalente « faut pas pousser mémé dans les hortensias » reprend une image, une sonorité et une signification similaires, sans pour autant condamner ladite mémé à l’apparition de plaques d’urticaires (tout au plus aura-t-elle besoin d’une bonne douche pour se débarrasser des fleurs et de la terre).

Enfin, précisons que cette expression cocasse et amusante est une particularité française, puisque les autres langues se contentent de formuler littéralement l’idée de « ne pas pousser trop loin », comme dans la phrase anglaise « Don’t push it too far ».

Exemples de l’usage de l’expression « faut pas pousser mémé dans les orties »

Certes, je vous l’accorde bien volontiers, l’expérience soviétique n’a pas été concluante, surtout après la Seconde Guerre mondiale quand, sous la pression des Américains, Staline a été poussé à la faute. C’est vrai qu’il avait un peu poussé mémé dans les orties au niveau des droits de l’homme, comme ils disent aujourd’hui.

Arnaud Viviant, Le Génie du communisme

J’suis le roi du rodéo. Y a pas pire que moi pour filer des coups de pied en vache et des coups de pied aux vaches, faire le diable à quatre, écorcher les chats, filer des coups de latte aux chiens et pousser la mémé dans les orties, j’suis un pas fréquentable, alors viens ici, sois mignon, et donne un bisou à ton vieux tonton.

Mark Richard, Fishboy

Quand Griffet qui cherchait à se planquer près des lavabos a vu tout ça, il en est devenu dingue : ses « précieux » illustrés volés « à prix d’or » à la librairie du coin. On n’avait pas grand-chose et ce qui était à nous était à nous, merde alors ! Fallait pas pousser mémère dans les orties, comme on disait.

Alain Sasson, Coups de sang
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Nicolas Lafarge

Nicolas Lafarge est rédacteur indépendant, et prête ses mots à différents médias et entreprises. Se décrivant volontiers comme « un geek avec une plume », il se sent dans son élément naturel lorsqu’il écrit sur des sites web tels que La langue française.

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Commentaires

Ranula36

Bonsoir,

Dans ma jeunesse - les années 1945/1950 -, on utilisait l'expression complète :" Faut pas pousser Mémé dans les orties, elle n'a pas de culotte".
Est-ce par décence que la fin de l'expression a été coupée ?

De nombreuses expressions se sont vues "raccourcies", au point que leur origine en est même oubliée :
- con comme un balai ...sans poil.
- con comme une valise ... sans poignée. Etc..
Sans leur fin, elles n'ont aucune signification.

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l'Alpin accroché

Pas d'accord avec votre rédacteur qui présente l'ortie comme une "mauvaise herbe", qu'elle soit urticante, d'accord, qu'il faille éviter d'y tomber dedans, d'accord ; mais cette plante a comme première vertu d'être comestible (sous forme de soupe ou de gratin), elle a des vertus phyto-thérapeutiques reconnues, elle est utilisée comme insecticide et fertilisant naturel (le purin d'ortie), elle accueille plusieurs variétés d'insectes pollinisateurs, en bref elle n'a rien d'une "mauvaise herbe" hors son côté piquant.

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